L'introspection
24 déc. 2024
Dans toutes les circonstances de la vie, l’introspection est un processus essentiel, sans doute le plus puissant dans lequel vous pouvez vous engager. C’est l’acte de recul vous permettant d’identifier, de comprendre et de transcender les croyances limitantes et les dynamiques internes bloquées dans l’enfance. Ces dernières influencent vos choix et dictent vos décisions, ou alimentent votre souffrance, vos traumatismes, vos schémas répétitifs, vos émotions négatives envahissantes et vos comportements automatiques.
L’introspection a pour intention fondamentale de dépasser l’identification au « personnage » – mental et psychique – auquel vous êtes identifié(e) inconsciemment depuis l’enfance. Cette démarche vous invite à découvrir un espace intérieur de sérénité, préalable à votre identification à cette fausse identité ou personnage.
En cultivant cet espace de sérénité, vous créez les conditions nécessaires pour compléter votre évolution vers l’autonomie psycho-émotionnelle, tout en vous ouvrant à l’amour sans objet et à la pure joie d’être, qui émanent naturellement de votre Véritable Nature.
Pour approfondir ce processus, il est essentiel d’adopter une vision philosophique et métaphysique de la liberté intérieure, enracinée dans la réalité fondamentale — l’essence de ce qui Est, qui demeure vraie au-delà de toutes les interprétations humaines. Cet article vous invite à découvrir cette perspective et à explorer vingt-sept bénéfices qu’offre la pratique de l’introspection.
L’introspection : une démarche de transformation
Il est essentiel de comprendre que votre fonctionnement psychique depend des croyances qui façonnent vos pensées et vos émotions. Vos pensées et vos émotions influencent vos mots et vos choix. Vos choix déterminent vos actions. Vos actions construisent vos habitudes. Vos habitudes définissent vos valeurs, et vos valeurs tracent votre destinée.
L’introspection permet de court-circuiter la tendance instinctive à vous identifier à vos schémas mentaux. Ce processus implique d’examiner attentivement vos croyances limitantes, vos habitudes de pensée, ainsi que vos choix et décisions dans une situation donnée, afin d’en évaluer la validité, la justesse et la pertinence dans vos actions.
C’est la volonté de remettre en question vos certitudes, de ne pas accepter systématiquement les choses telles qu’elles se présentent, et d’oser douter de vos propres interprétations.
C’est apprendre à vous détacher de votre tendance instinctive à vous identifier personnellement à toutes les pensées, interprétations ou réactions émotionnelles qui traversent votre esprit.
C’est un processus de discernement permettant de distinguer le vrai du faux, de clarifier vos interprétations subjectives et de déconstruire les croyances erronées ou limitantes qui influencent votre psychisme.
C’est l’identification des origines profondes de vos pensées récurrentes et envahissantes, pour apprendre à les accueillir, à les comprendre et à vous en détacher.
C’est la remise en question de l’identité mentale, ce « personnage » que vous avez toujours pensé être, afin de ne plus rester prisonnier de ses croyances, de ses habitudes de penser, de ses mécanismes défensifs et de ses schémas inconscients.
C’est un choix de liberté intérieure : renoncer à vous tourmenter en vous identifiant à ce que vous n’êtes pas, et abandonner l’idée que vos interprétations personnelles sont des vérités absolues.
En somme, l’introspection est une invitation à explorer les profondeurs de votre psyché, à questionner vos conditionnements, et à renouer avec votre authenticité et votre sens de l’humour. Elle vous encourage à dépasser les illusions et les réflexes mentaux hérités du passé ou influencés par autrui.
Ce que vous remettez en question par l’introspection
L’introspection vous invite à remettre en question tout ce que vous avez introjecté, incorporé et intériorisé tout au long de votre vie. Elle vous offre une opportunité précieuse de vous arrêter un instant et de vous poser des questions essentielles.
Le professeur Sam Vaknin propose ces questions :
Vous êtes-vous déjà interrogé(e) sur le rôle que jouent vos souvenirs dans votre façon de penser et de ressentir ?
Avez-vous remarqué l’existence d’un dialogue mental constant dans votre esprit, composé de « voix » que vous avez intégrées au fil du temps ?
Votre identité – cette personnalité que vous percevez comme immuable et fondamentale – interagit-elle avec ce dialogue intérieur ? En est-elle influencée ?
Si vous êtes identifié(e) à cette « identité » ou « personnage », comment ce dialogue façonne-t-il vos choix et vos comportements ?
Quelle signification attribuez-vous à ce discours intérieur, et quelles leçons en tirez-vous ?
Êtes-vous capable de faire la distinction entre ce dialogue purement mental et la réalité, ou le laissez-vous contrôler vos perceptions et vos émotions ?
Tout au long de votre vie, vous avez accumulé des représentations imaginaires et des messages issus des figures importantes de votre entourage. Ces messages, souvent implicites ou explicites, ont formé vos « introjections » : des images ou voix internes qui peuplent votre esprit et influencent votre manière de penser et de ressentir.
Certaines de ces voix représentent vos parents et leurs jugements, souvent négatifs. D’autres proviennent d’enseignants, de figures d’autorité ou même de personnes qui vous ont profondément blessé(e). Ensemble, elles constituent le système de votre dynamique psychique.
Dans ce système, ces voix intérieures – issues de vos perceptions des figures marquantes de votre vie – cohabitent en une sorte de « chambre mentale ». Ces entités influencent vos choix, vos émotions et vos décisions, souvent sans que vous en ayez pleinement conscience.
Une bataille mentale constante
Les valeurs et croyances portées par ces « objets internes » s’opposent, se contredisent ou évoluent lorsque de nouvelles informations viennent les conforter ou les remettre en question. Ce processus peut être enrichissant, car il favorise une forme de croissance personnelle.
Cependant, ce système peut également se figer. Cela se produit lorsque votre attention reste inconsciemment focalisée sur certains messages subliminaux ou croyances héritées, que vous prenez à tort pour les vôtres. Ces blocages freinent votre liberté intérieure et renforcent des mécanismes automatiques qui ne reflètent pas nécessairement votre vérité personnelle.
Premier bénéfice de l’introspection
Un processus d’introspection efficace vous permet de prendre conscience des « objets internes », du dialogue intérieur et de l’intrigue narrative inconsciente qui habitent votre esprit. Ces éléments, souvent invisibles mais profondément influents, façonnent vos réactions, vos perceptions et vos décisions.
Grâce à l’introspection, vous pouvez :
Identifier les « objets internes » que vous avez introjectés, incorporés et intériorisés au fil du temps, ainsi que leur influence sur vos émotions, vos choix et vos comportements.
Reconnaître les mécanismes de projection à travers lesquels vous transférez ces « objets internes » sur les autres, influençant ainsi vos relations et vos interactions.
Ces prises de conscience constituent une étape fondamentale pour entamer le processus de désintrojection :
En explorant ces voix intérieures, vous pouvez progressivement vous détacher des souvenirs traumatiques et des croyances limitantes qui ont marqué votre psychisme.
Cela vous permet de reconstruire une vision de la vie plus alignée sur votre essence véritable, libérée des poids inconscients du passé.
L’introspection, en éclairant ces aspects intérieurs, devient un outil puissant de transformation personnelle et d’émancipation mentale.
Les zones d’ombre de votre psychisme
Il est fondamental de reconnaître le « personnage » psychique qui s’est construit durant l’enfance, souvent en réaction à des traumatismes engendrés par un environnement familial dysfonctionnel.
Ce « personnage », conçu pour vous protéger, masque des zones d’ombre : les aspects inconscients de votre psychisme qui influencent profondément vos émotions, vos comportements et vos relations.
En restant identifié(e) à ce « personnage », vous maintenez ses zones d’ombre sans même en avoir conscience. Ces zones recèlent des dynamiques non résolues qui demandent à être explorées. Un travail d’introspection vous permet de vous désidentifier progressivement de ce personnage et de comprendre les mécanismes inconscients qui gouvernent vos pensées et vos actions.
Quelles zones d’ombre explorer grâce à l’introspection ?
Voici quelques exemples de zones d’ombre qui méritent votre attention :
Les mécanismes défensifs primitifs, figés durant l’enfance, qui continuent de dicter vos réactions face à l’adversité mentale que vous entretenez inconsciemment.
Les doutes, le vide intérieur et les manques émotionnels qui alimentent une quête incessante de validation ou de complétude extérieure.
La pensée magique, les fantasmes inconscients et les attentes irréalistes, tant envers vous-même qu’envers les autres.
Le type d’attachement que vous avez développé, influençant profondément vos relations interpersonnelles.
Le complexe d’infériorité ou le délire de supériorité, issus d’une altération de votre perception de vous-même, de votre place dans le monde et de votre valeur.
Le refoulement émotionnel qui perturbe l’harmonie de votre système énergétique, jusqu’à rendre vos émotions vraiment toxiques.
L’origine de vos émotions négatives, telles que l’anxiété chronique, la honte toxique, la peur et la culpabilité constantes, qui limitent votre épanouissement.
Les jugements et critiques intérieurs, façonnant l’image négative que vous entretenez de vous-même.
Le manque d’estime personnelle et de confiance en vous, qui freine vos initiatives et vos décisions.
Les croyances limitantes et distorsions cognitives, influençant votre vision du monde et des autres.
Les besoins compulsifs et addictions, utilisés pour éviter de faire face à vos ressentis profonds.
Les dysfonctionnements de votre ego, issus de la focalisation de l’attention sur un « enfer triadique » qui altère votre perception et obscurcit votre capacité à examiner la réalité avec discernement.
Les 9 portraits psychologiques du psychiatre chilien Claudio Naranjo dans son livre intitulé Ennéagramme, caractère et névrose sont des descriptions remarquables de l’obscurcissement ontologique et des zones d’ombre propres à chaque structure psychique, qui vous permettent d’investiguer la vôtre.
Le « diamant noir » de toutes nos peurs : l’enfer triadique
Le « diamant noir » de toutes nos peurs n’est pas la peur de la mort, ni celle de ne pas exister, mais bien celle de « ne pas être ». Nos peurs et anxiétés trouvent leur origine dans une insécurité profonde.
Cependant, il est essentiel de souligner que l’anxiété et l’insécurité chroniques ne peuvent persister sans la focalisation inconsciente de l’attention sur une croyance limitante ou une véritable défaillance.
La personne souffrant de dépendance affective, par exemple, oriente inconsciemment son attention sur un « enfer triadique » formé par la fusion de trois incapacités et sensations :
Un doute profond de soi : une incapacité à définir une direction claire pour sa vie, causée par une altération de la perception de soi et par un doute ontologique.
Un manque d’amour, de valeur personnelle et de sens dans sa vie.
Un vide abyssal, souvent vécu sous la forme d’une dépression chronique ou latente.
L’identification à cet « enfer triadique » engendre une hypnose identitaire chez chaque Ennéa-type. Cette hypnose se caractérise par la confusion, le régression d’âge, une honte toxique insupportable et une quête incessante inatteignable.
Ces quêtes inatteignables peuvent prendre différentes formes selon les individus : par exemple, une recherche obsessionnelle d’amour chez les personnes dépendantes affectives ou une quête existentielle chez les narcissiques pathologiques.
Pour en savoir plus sur ces dynamiques cliquez ici : Les narcissiques classiques ; Les narcissiques cachés ; S’affranchir de dépendance affective.
Il est insensé de poursuivre ce que nous constitue, car l’amour et l’existence font intrinsèquement partie de notre êtreté.
« L’observateur » : la focalisation de l’attention sur l’enfer triadique
Nous avons tous la capacité d’observer nos dynamiques internes. Cependant, les personnes souffrant de dépendance affective, du trouble de la personnalité limite (borderline) ou de narcissisme pathologique, entre autres, ne savent pas comment observer ni identifier ce qui se passe dans leur psychisme. Souvent, cela ne les intéresse pas, alors qu’il est essentiel de comprendre ce qui nous arrive.
Lorsque je pose la question : « Ton attention, où se focalise-t-elle ? », les dépendants affectifs répondent souvent : « Sur mon/ma partenaire intime. »
Et quand je leur demande : « Qu’évites-tu en focalisant ton attention sur lui/elle ? », ils me donnent des réponses similaires : « J’évite le danger de me retrouver seul, sans amour, vide, sans place dans ce monde, sans histoire, et incapable d’exister sans son amour. »
Ils répondent cela, même si leur partenaire est un(e) narcissique pathologique qui, de toute évidence, ne leur donne aucun ARA : Amour, Respect et Attention.
Leur attention, représentée par ce que l’on appelle « l’observateur », demeure figée sur « l’enfer triadique » : le doute de soi, le manque ou la perte de l’amour de l’autre, ainsi qu’un vide abyssal.
Ces personnes vivent dans une insécurité permanente et de régression d’âge, qui les empêche d’avoir un ego fonctionnel. Pour comprendre les possibles dysfonctionnements de votre ego cliquez ici : Les fonctions cruciales de l’ego.
Deuxième bénéfice de l’introspection
Un processus d’introspection efficace vous permet de découvrir toutes les dynamiques mentales de votre psychisme, d’en comprendre les zones d’ombre et de vous en désidentifier progressivement.
En explorant ces zones d’ombre, vous pouvez progressivement les assimiler, vous en désidentifier et vous éveiller de l’hypnose identitaire qui contrôle votre vie, évoluant alors vers votre autonomie.
L’introspection ouvre la voie à une transformation profonde. Elle vous permet de discerner ce qui émane de constructions mentales façonnées par votre vécu douloureux et ce qui exprime votre être authentique dans l’instant présent.
L’influence de notre société narcissique
Examinons comment les messages délirants – implicites et explicites – véhiculés par notre société influencent profondément votre perception de vous-même et du monde qui vous entoure.
En psychologie et psychiatrie, le délire désigne une altération de la pensée individuelle, marquée par des croyances ou des idées fausses en opposition avec la réalité.
Ainsi, dans une société narcissique, certaines idéologies ou valeurs collectivement acceptées sont extrêmement délirantes : des croyances irréalistes ou des attentes excessives auxquelles les gens adhèrent sans les remettre en question, comme celle d’« être une image ».
Prenez un instant pour réfléchir. Si une voix dans votre esprit vous murmure : « Sois quelqu’un. Démarque-toi ! », que vous dit-elle vraiment ?
Cette voix venue de l’extérieur – qu’elle soit des médias ou des normes culturelles – ne vous invite pas réellement à être vous-même. Au contraire, elle impose des attentes et des modèles idéalisés éloignés de votre être authentique. Elle insiste encore : « Sois quelqu’un. Démarque-toi ! »
Maintenant posez-vous cette question :
Cette injonction de devoir « devenir quelqu’un », n’est-elle pas une construction artificielle, une aberration imposée par la société narcissique ? Une société qui exige un positionnement relatif, une identité définie par la comparaison constante avec les autres.
Des études menées depuis 2008 révèlent que le positionnement relatif – ce besoin de se situer par rapport aux autres – est l’une des principales sources d’anxiété et de dépression. Les médias sociaux, en particulier, ont exacerbé cette dynamique : chez leurs utilisateurs, les taux d’anxiété et de dépression ont triplé, voire quadruplé, en raison du mécanisme de comparaison, qui amplifie la quête de validation.
Le mécanisme de comparaison
Le mécanisme de comparaison est un automatisme par lequel vous évaluez vos accomplissements ou votre apparence en vous mesurant constamment aux autres, selon les critères idéalisés et irréalistes imposés par notre société narcissique.
Caractéristiques principales d’une société narcissique :
La valorisation de l’image et de l’apparence :
L’importance excessive accordée à l’apparence physique, au style de vie « parfait » et à la mise en scène de soi, amplifiée par les réseaux sociaux et les médias.La quête de validation extérieure :
Par manque d’authenticité, les individus cherchent constamment à être validés par les autres, mesurant leur estime de soi à travers des « likes », des compliments ou des indicateurs de succès visibles.La compétition sociale :
Une focalisation sur la réussite personnelle, souvent définie par des critères matérialistes comme la richesse, le pouvoir ou la célébrité, ce qui favorise une culture de comparaison et de rivalité.Un individualisme exacerbé :
La priorité donnée à l’individu sur le collectif, avec une moindre attention aux besoins de la communauté, de la solidarité humaine ou de l’empathie.La peur de la vulnérabilité :
Une incapacité à accepter ou montrer ses fragilités, avec une tendance à masquer ses échecs et insécurités pour préserver une image idéalisée.La consommation comme identité :
Les biens matériels et les expériences luxueuses deviennent des symboles de statut, renforçant l’idée que l’identité est liée à ce que l’on possède ou exhibe.
La société narcissique génère un climat de pression sociale, d’insatisfaction chronique et de détachement émotionnel. Elle vous encourage à vous concentrer sur vous-même de manière excessive, tout en vous privant de connexions humaines profondes et d’un véritable sentiment de sens.
Allez encore plus loin et posez-vous ces questions essentielles :
L’injonction de devoir « devenir quelqu’un » d’où vient-elle et à qui peut-elle influencer ? À ce que vous êtes véritablement ?
Ou bien, cette injonction sert-elle à apaiser le sentiment d’insignifiance d’un « moi » mental, assujetti aux images que la société vous vend ?
Êtes-vous l’image que la société narcissique vous impose ? Êtes-vous sa marionnette ? Ou ni l’un ni l’autre ?
C’est à vous d’explorer cette réflexion et de répondre à cette question centrale : « Qui suis-je réellement ? »
Troisième bénéfice de l’introspection
L’introspection vous offre la possibilité de tracer des frontières claires entre votre véritable essence et les influences extérieures.
Ce processus vous aide à :
Identifier et distinguer vos véritables besoins des exigences imposées par la société.
Vous libérer des injonctions artificielles de conformité et de validation, tout en écoutant la voix de votre être authentique.
En cultivant cette lucidité, l’introspection devient une voie vers une existence plus alignée avec vos aspirations réelles et une plus grande paix intérieure.
Les obstacles de l’introspection et comment les surmonter
L’introspection est un processus d’examen réfléchi et approfondi de vos croyances, comportements et zones d’ombre. Elle vise à mieux vous comprendre, à identifier vos forces et limites, et à favoriser votre croissance personnelle tout en éclairant vos décisions. Cependant, ce cheminement peut être entravé par divers obstacles.
1. Votre attitude interne
L’introspection ne peut porter ses fruits sans une intention sincère et une véritable volonté de questionner vos certitudes et vos zones d’ombre.
Obstacle : Une attitude rigide ou un manque de respect envers vous-même peut limiter votre capacité à explorer votre psychisme.
Solution : Développez une connexion plus consciente avec votre corps et vos sensations.
Prenez l’habitude de vous concentrer sur votre respiration ou vos ressentis corporels lorsque vous réfléchissez, que ce soit en position assise ou en marchant. Évitez cependant ces exercices lorsque vous conduisez. Une approche respectueuse et bienveillante envers vous-même est essentielle.
2. Votre capacité de réflexion
Une capacité limitée à réfléchir de manière structurée peut rendre l’introspection difficile et décourageante.
Obstacle : Sans une méthode claire, il est facile de se perdre dans ses pensées ou de rester à la surface des problèmes.
Solution : Tenez un journal d’introspection et structurez vos écrits de la façon suivante :
Sur la colonne ou la page de gauche : Notez juste les faits concrets de vos expériences.
Sur la colonne ou la page de droite : Ajoutez vos observations, réflexions ou interprétations.
Cette méthode vous aidera à prendre du recul et à poser des questions pertinentes sur vos interprétations. Vous pouvez approfondir ces techniques en suivant mes cours et en utilisant quelques questions que je propose dans mes articles.
3. Vos systèmes défensifs
Ces mécanismes inconscients constituent souvent le plus grand obstacle à l’introspection.
Obstacle : Le personnage psychique que vous croyez « être » érige des boucliers pour se protéger et maintenir son existence. Cela peut empêcher une exploration honnête et profonde de votre psychisme.
Solution : Apprenez à identifier vos systèmes défensifs.
Posez des questions ciblées pour explorer les zones d’ombre qui nourrissent ces mécanismes. Travaillez sur une description détaillée de votre portrait psychologique pour révéler les dynamiques internes méconnues.
Les articles du Professeur Sam Vaknin, expert en psychologie, peuvent fournir des éclairages utiles. Des séances avec un thérapeute peuvent également vous guider dans ce processus.
4. La paresse
La paresse, ou un manque de discipline, peut constituer un obstacle majeur à l’introspection.
Obstacle : L’oubli de vous-même ou le manque de motivation peut freiner votre progression dans ce travail introspectif.
Solution : Mettez en place une routine quotidienne d’écriture.
Décrivez chaque jour les faits observés et revisitez régulièrement vos notes pour évaluer vos progrès. Cette discipline vous aidera à rester engagé(e) dans votre cheminement introspectif.
Première question : Suis-je ce que j’ai toujours cru être ?
Pour répondre à cette question, je vous propose quelques exemples illustrant les premières étapes d’un processus d’introspection efficace.
J’ai appris ces exercices auprès de mon professeur Stephen Wolinsky, psychothérapeute américain et pionnier du processus de la déshypnose, fondé sur la « double négation » de la Non-dualité. J’ai eu l’opportunité d’approfondir ses enseignements pendant plusieurs années.
Étape 1 : Faites une liste de vos croyances sur vous-même
Commencez par identifier les croyances que vous entretenez à propos de vous-même, qu’elles soient perçues comme positives ou négatives.
Exemples de croyances positives :
• « Je suis très empathique. »
• « J’ai tant et tant d’amour à donner ! »
• « Je rayonne, et la joie que j’émane transforme les autres. »
Exemples de croyances négatives :
• « Je ne suis jamais à la hauteur. »
• « Je suis quelqu’un sans histoire. »
• « Je n’y arriverai jamais. »
Il est crucial de comprendre que votre véritable essence ne se limite ni au meilleur, ni au pire des idées que vous avez sur vous-même.
Vous n’êtes ni les auto-définitions qui sapent votre confiance en vous-même, ni les doutes qui nourrissent votre manque d’estime personnelle. De plus, beaucoup de vos croyances valorisantes ne font que renforcer une image de vous-même façonnée par votre personnage psychique, une image qui vous éloigne de votre être authentique.
Étape 2 : Interrogez chaque croyance
Dans une attitude de respect envers vous-même, tout en respirant, posez-vous ces questions :
Exemple 1 : « Je suis très empathique. »
• À qui arrive la pensée d’être empathique ? Réponse possible : « À moi. »
• Au « moi » qui croit quoi à propos de « devoir être » empathique ? (Faites une liste).
• Qu’est-ce que ce « moi » évite par cette croyance ? (Faites une liste).
Exemple 2 : « Je n’y arriverai jamais. »
• À qui arrive la certitude de ne pas pouvoir arriver ? Réponse possible : « À moi. »
• Au « moi » qui croit quoi à propos de « devoir arriver » sans y parvenir ? (Faites une liste).
• Qu’est-ce que ce « moi » évite par cette croyance ? (Faites une liste).
Demandez-vous si ce que vous évitez le plus dans ce monde n’est pas « l’enfer triadique » : votre peur de « ne pas être ».
Ces exemples sont juste le début d’un processus approfondi d’introspection, qui vous permet de voir que, dans votre esprit, il existe de multiples « moi », chacun avec une intentionnalité de survie.
Étape 3 : Une réflexion profonde : « Suis-je ? »
Premier exemple :
Suis-je le « moi » qui se croit empathique ?
Suis-je « l’observateur » qui crée et contemple ce moi ?
Ou aucun des deux ?
Deuxième exemple :
Suis-je le « moi » qui affirme qu’il n’y arrivera jamais ?
Suis-je « l’observateur » qui crée et contemple ce moi ?
Ou aucun des deux ?
Ces exemples vous permettent de pratiquer une double négation, qui vous amène à un processus de Déshypnose Identitaire. Vous comprendrez ce sujet en avançant dans la lecture de cet article.
Une compréhension essentielle
Ce que vous êtes est préalable aux définitions que vous avez construites ou que l’on vous a imposées. En explorant cette vérité, vous pouvez vous libérer des schémas restrictifs et vous reconnecter à une vision plus authentique de vous-même.
La réalité essentielle : le « Je suis » sans définitions ajoutées
Votre Véritable Nature s’exprime dans une réalité essentielle, qui existe avant toute mémoire, tout concept, toute définition ou tout rôle imposé ou auquel vous vous identifiez.
Lorsque vous êtes vraiment Présent – dans la réalité essentielle – vous :
Ressentez une sérénité intérieure, un amour sans objet et vous pouvez aimer les autres.
Vivez dans le « Je suis » sans définitions ajoutées.
Agissez avec spontanéité et fluidité, sans chercher à correspondre à une image.
Cessez d’analyser ou de juger ce qui se passe, et agissez – sans réagir – à partir d’une clarté ou d’une intuition intérieure qui transcende les pensées.
Reconnaissez intuitivement ce qui est authentique en vous, au-delà des conditionnements extérieurs.
Ressentez une congruence entre ce que vous êtes, ce que vous faites, et ce que vous ressentez, sans effort ni désir de « paraître ».
Incarnez l’unité avec la vie, sans séparation entre « vous » et le monde.
Éprouvez une connexion profonde avec les éléments qui vous entourent et avec les autres, sans ressentir de séparation.
Ressentez un contentement intérieur, une gratitude et une joie simplement d’être là, indépendants des circonstances extérieures.
En résumé :
La réalité essentielle se manifeste comme un état d’être pur, où vous êtes libéré(e) des filtres mentaux, des conditionnements sociaux et des identifications superficielles. Elle n’est pas quelque chose que vous « obtenez », mais plutôt ce qui reste lorsque tout ce qui est artificiel ou acquis est mis de côté par le processus de l’introspection.
Les noms de la Conscience Absolue
La conscience absolue – non différenciée est évoquée dans de nombreuses philosophies et traditions spirituelles sous différents noms :
Jean-Paul Sartre la décrit comme le « néant ».
La philosophie Non-duelle la désigne comme « votre véritable nature indicible » ou encore comme « ce qui Est ».
Dans le bouddhisme, elle est appelée « vacuité » ou « nirvana ». Le nirvana, concept central du bouddhisme, signifie l’« extinction » de votre fausse personnalité et représente l’état ultime de liberté intérieure.
Quatrième bénéfice de l’introspection
L’introspection vous aide à démêler les illusions qui vous entravent, vous permettant de demeurer pleinement dans votre Véritable Nature, à la fois indicible et intemporelle.
Votre Véritable Nature s’incarne dans le « Je suis », votre être authentique qui, grâce au processus d’introspection, devient votre guide intérieur.
Vous reposez alors dans ce « néant » ou cette « substance unique » d’où émergent votre corps, votre force vitale et votre joie profonde d’être et d’exister.
Le néant : votre meilleur guide
Un être humain guidé par le néant ne vit pas comme s’il « n’était personne » ni ne s’enferme dans une philosophie de l’inaction ou de l’impuissance. Bien au contraire, il choisit d’être pleinement humain. Cela implique :
Établir de véritables frontières entre soi et le monde extérieur : vivre pleinement, en toute liberté, affranchi des contraintes et des injonctions imposées par la société.
Choisir le bonheur : refuser de s’enfermer dans des schémas de domination, de victimisation ou de malheur.
Agir à partir de son intériorité, en accord avec ses aspirations profondes, plutôt que sous l’influence des pressions extérieures qui nuisent au bien-être commun.
Préserver son autonomie émotionnelle : refuser de laisser les autres contrôler ses émotions, humeurs, pensées ou actions.
Cinquième bénéfice de l’introspection
Grâce au processus de l’introspection, vous vous laissez guider par le néant, cet espace intérieur — non mental — dépourvu d’illusions, où l’authenticité prend racine.
Ce cheminement vous permet d’incarner pleinement votre maturité, votre autonomie, votre authenticité et votre liberté. Vous apprenez à vivre à partir de votre véritable essence, en harmonie avec vous-même et le monde qui vous entoure.
La conscience individuelle différenciée
Lorsque la conscience absolue se « condense », elle se manifeste sous la forme d’une conscience différenciée et limitée, donnant naissance à votre « sens de moi ».
Ce « personnage » psychique, auquel vous vous identifiez, se perçoit comme « séparé » du néant, de la conscience absolue, de sa propre substance unique. Le fait est que vous ne pouvez pas vous séparer de ce que vous êtes réellement.
Cette illusion de séparation résulte d’une confusion mentale qui s’installe dans l’enfance et se renforce avec le temps. En vous identifiant à cette identité – purement mentale – vous semblez vous éloigner de votre Véritable Nature Indicible. Cette illusion devient une source de souffrance.
Votre attention se focalise alors sur ce « personnage » mental, qui nourrit vos doutes, votre manque d’amour, votre faible estime de soi et votre manque de confiance en soi, tout en accentuant le vide intérieur que vous ressentez.
Lorsque vous vous identifiez à « l’observateur » qui fixe son attention sur ce personnage mental, s’y absorbe et finit par se confondre avec lui, vous entrez dans un état d’« autohypnose ». Cet état engendre une rupture dans le processus naturel de devenir et vous éloigne encore davantage de votre véritable nature.
Sixième bénéfice de l’introspection
L’introspection vous aide à réaliser que vous n’êtes ni une image, ni un « personnage », ni une identité mentale, ni un « faux self », ni même l’observateur qui les crée et les contemple.
Ce que vous êtes réellement, c’est le néant ou la conscience absolue, préalable à toutes ces identifications mentales.
Jean-Paul Sartre et le concept de néant
Jean-Paul Sartre a développé l’une des réflexions les plus marquantes de la pensée occidentale sur le concept de « néant » dans son ouvrage L’Être et le Néant. Il y explore l’idée d’une réalité préalable à l’« expérience consciente » limitée, une réalité qui transcende la conscience focalisée sur l’objet – c’est-à-dire la personne que nous croyons « être ».
Une reformulation de sa pensée :
Le néant, selon Sartre, est une conscience absolue, qui n’a besoin d’aucune condition pour exister et demeure présente, que nous en ayons conscience ou non.
Le néant est totalement distinct de notre conscience individuelle limitée et de notre besoin compulsif d’exister à travers nos relations.
Même lorsque nous perdons conscience ou que nous mourons, le néant subsiste. Il est l’« êtreté absolue », la réalité immuable qui dépasse les contingences de l’existence individuelle.
En revanche, la conscience limitée est définie par :
Son rôle social et son identification à un personnage mental, façonné par les expériences passées, les attentes d’un futur fantasmé.
Une dépendance à un « objet mental » ou un « objet extérieur » pour valider son existence.
Sous l’influence de cette conscience limitée, l’être individuel est pris dans un besoin compulsif d’utiliser les autres comme des béquilles pour combler son vide psychoaffectif ou existentiel. Ce mécanisme, profondément autoréférentiel, pousse constamment à rechercher une validation extérieure.
Septième bénéfice de l’introspection
L’introspection vous permet de reconnaître ces mécanismes de dépendance. Elle vous aide à cesser de vous appuyer sur les autres comme s’ils étaient indispensables pour combler vos besoins compulsifs. Par exemple, les narcissiques pathologiques recherchent désespérément une validation pour affirmer leur existence, tandis que les dépendants affectifs aspirent à un amour unique et romantique pour combler leur vide psychoaffectif. Tous deux perçoivent les autres comme des moyens de satisfaire leurs besoins insatiables.
Grâce au processus d’introspection, vous pouvez reprendre votre autonomie. En cessant de dépendre des autres pour remplir vos besoins psychoaffectifs, émotionnels et existentiels, vous retrouvez un équilibre et un pouvoir intérieur.
Une illustration de l’être individuel
Pour illustrer l’être individuel, Jean-Paul Sartre propose l’exemple du garçon de café dans L’Être et le Néant :
« Voici un garçon de café qui s’avance, rapide et pressé. Il s’incline avec empressement, son regard exprime un intérêt trop plein pour le client ; il vient vers lui d’un pas vif et souple, un peu trop précis, un peu trop rapide. Il se penche, il s’efforce de se plier avec la raideur d’un ressort trop tendu. Toute sa conduite semble un jeu. Il joue, il s’amuse. Mais à quoi joue-t-il ? On n’a pas à y penser longtemps : il joue à être garçon de café. »
Sartre utilise cette image pour montrer comment les individus peuvent se mentir à eux-mêmes en s’enfermant dans des rôles définis par la société et en niant leur liberté de transcender ces rôles. Ce comportement illustre parfaitement ce qu’il appelle le projet de « mauvaise foi » — contre soi-même.
La mauvaise foi, désigne le fait de se mentir à soi-même pour échapper à la responsabilité de sa liberté et de ses choix. Elle consiste à :
Se cacher derrière des masques ou des excuses.
Abuser des déterminismes ou avoir des positions rigides.
Prétendre qu’un rôle imposé définit entièrement son être.
L’objectif inconscient de la « mauvaise foi » contre soi-même est de fuir l’angoisse existentielle liée à la liberté totale, en anéantissant la liberté intérieure.
Bien qu’elle puisse offrir un certain confort, elle réduit l’individu à une fonction, à un rôle sans âme, dénué d’authenticité.
Dans ce contexte, nous pourrions aller plus loin en imaginant que le garçon de café focalise son attention sur une « position relative » : il s’est absorbé et confondu avec son personnage mental et ses zones d’ombre, en se définissant uniquement en fonction de la perception qu’il croit que les autres ont de lui.
En adoptant le masque d’un « garçon de café », il s’auto-hypnotise et trouve un certain confort dans cette illusion. En renonçant à sa liberté, il devient esclave des attentes sociales. Ce rôle, bien qu’apparemment anodin, l’empêche d’assumer pleinement sa condition d’être libre et humain. Il se réduit à une fonction mécanique, étrangère à son essence profonde et à son authenticité.
Huitième bénéfice de l’introspection
Le processus d’introspection vous permet de :
Abandonner les mécanismes de survie et les automatismes psychologiques hérités de votre passé en lien avec la société.
Rompre avec les réactions automatiques et conditionnées, qui vous font agir comme un robot face aux autres, ou dans des situations où vous vous sentez « vu » ou « vue ».
Transcender les rôles sociaux imposés, pour agir avec authenticité.
En accomplissant cela, vous accédez naturellement à un espace de liberté intérieure, qui vous ouvre à l’écoute de votre intuition et de votre être authentique.
Le projet de mauvaise foi : une auto-illusion
En suivant la pensée de Jean-Paul Sartre, le professeur Sam Vaknin décrit la perte de liberté comme un mécanisme dans lequel l’individu nie le néant au profit d’un « objet serveur ».
La liberté, essentielle à votre essence véritable, est perçue comme un fardeau par le « personnage » mental auquel vous vous identifiez.
Cette liberté vous impose de décider ce que vous devez faire, d’assumer vos choix et vos responsabilités. Cependant, dès l’instant où vous vous identifiez à ce « personnage », vous projetez votre existence sur un « objet extérieur ».
Ainsi, lorsque vous devenez « le serveur » ou « le garçon de café » et que vous vous identifiez pleinement à ce rôle extérieur à votre essence, vous perdez votre liberté intérieure.
Identifié à ce personnage mental, vous êtes apparemment libéré(e) de la prise de décision et du poids des responsabilités. Vous n’avez plus à choisir, ni à assumer quoi que ce soit.
Ce soulagement apparent vous donne l’illusion d’être libre de vos choix et décisions. Cependant, ce que vous percevez comme une liberté est en réalité une forme subtile d’esclavage.
Votre comportement devient automatique, robotique, dicté par le rôle que votre personnage a adopté.
L’illusion de liberté dans l’esclavage
Paradoxalement, la plupart des esclaves se sentent très libres, affirme Sam Vaknin.
C’est là que réside l’illusion : l’esclavage offre un sentiment de liberté, car il supprime l’inquiétude, la nécessité de choisir, de décider, et surtout, de prendre des responsabilités personnelles. Cette fausse liberté est perçue comme un soulagement par ceux qui fuient leur propre autonomie.
Devenir un esclave d’un rôle ou d’un projet inconscient peut être vécu comme une forme de liberté. Mais, en réalité, c’est un acte de mauvaise foi contre soi-même. Cette illusion d’être libre n’est qu’un masque dissimulant un état de dépendance et d’asservissement.
C’est précisément pour cette raison que les individus peuvent donner du pouvoir à des figures autoritaires ou des dictateurs : ils recherchent l’esclavage parce qu’il leur procure un confort psycho-émotionnel. Cependant, ce projet de mauvaise foi contre eux-mêmes est profondément contradictoire et les éloigne de leur être authentique.
La liberté intérieure et la conscience absolue
Il est impossible de demeurer dans le néant – la conscience absolue – tant que l’on reste identifié à un « personnage » mental ou à un projet extérieur à Soi.
L’être individuel, toujours défini par ses relations avec des objets externes ou internes, reste enfermé dans une existence relative.
En revanche, la conscience absolue – ou le néant – transcende ces limites. Elle est l’unique réalité, immuable, inconditionnée et libre de toute dépendance aux rôles ou objets mentaux.
Neuvième bénéfice de l’introspection
Le processus d’introspection vous permet :
De transcender l’activité de « mauvaise foi » envers vous-même.
De vous désidentifier du « personnage » ou « faux self » que vous aviez cru être.
D’écouter la voix de votre être authentique ainsi que celle de votre intuition.
De découvrir votre liberté intérieure.
De vous ancrer dans le « Je suis », libre de toute définition, des automatismes, des rôles imposés et des illusions de fausse liberté.
Vous constatez alors que vous évoluez rapidement vers l’autonomie, tandis que les fonctions essentielles de votre ego s’établissent et s’organisent de manière naturelle et harmonieuse.
Le néant : la seule réalité possible
L’idée que la « seule réalité » qui existe est le « néant » constitue une invitation à reconnaître la conscience absolue, préalable à tout conditionnement mental.
Ce « néant » n’est pas un vide effrayant ou nihiliste. Au contraire, il incarne un devenir infini, une ouverture qui nous permet de découvrir notre intention profonde et le véritable sens de notre existence : ce que nous sommes réellement.
Dixième bénéfice de l’introspection
Vous « déshypnotiser », c’est apprendre à voir au-delà des apparences et à embrasser la seule réalité : votre Véritable Nature indicible, le néant. C’est précisément ce que vous offre le processus d’introspection.
La conscience et son pouvoir de nier
Sam Vaknin explique que l’une des activités fondamentales de la conscience est son pouvoir de nier, de remettre en question tout ce que nous « croyons être » mais que nous ne sommes pas réellement. Grâce à ce pouvoir, la conscience peut remettre en question, altérer, détruire, éliminer ce que nous pensons être, mais qui n’est en réalité qu’une illusion.
La conscience est donc en perpétuelle création, intégrant des objets internes et externes dans un récit. Cependant, elle possède également une capacité unique : celle de nier. Ce pouvoir de négation peut être orienté vers l’extérieur ou vers l’intérieur, permettant à l’individu de constater et de faire l’expérience du néant.
La peur de la négation : une insécurité interne
Lorsque vous êtes identifié(e) à votre « personnage » mental, ce pouvoir de négation devient une source d’une insécurité profonde, comparable à une épée de Damoclès suspendue au-dessus de votre existence.
Cette peur naît du fait que la conscience peut utiliser son pouvoir de négation pour remettre en cause l’existence conceptuelle de votre personnage mental. Vous pourriez ressentir la peur de disparaître s’il est remis en question.
Vous redoutez de perdre votre activité autoréférentielle, qui donne une illusion de stabilité à votre fausse identité. C’est l’une des principales sources d’angoisse lorsque vous êtes identifié(e) à votre personnage mental.
Onzième bénéfice de l’introspection
L’introspection vous permet de :
Prendre conscience de votre identification à cette insécurité et aux conditions que votre personnage mental demande pour « exister ».
Transcender cette identification, en demeurant dans votre Véritable Nature, libre des illusions et de rêves irréalistes du personnage psychique.
Vous réalisez alors une vérité fondamentale : Vous ne pouvez pas ne pas être.
La liberté intérieure et le processus de négation
Le processus de négation est la capacité fondamentale de remettre en question tout ce que nous croyons être, mais que nous ne sommes pas réellement. Ce doute, intrinsèque à la conscience, reflète une aptitude naturelle à choisir, enracinée dans notre liberté intérieure. Cette capacité nous offre la possibilité de construire un « moi » sain et solide, à condition de faire des choix réalistes, en accord avec les diverses strates de la conscience. Et ces choix reposent sur la liberté.
Les strates de la conscience sont :
La dimension externe.
La dimension biologique et animale.
La dimension de l’intellect subtil, capable de discerner.
La dimension d’un mental purement mécanique.
La dimension émotionnelle, souvent assujettie au mental.
La dimension du « Je suis », dépourvue de toute définition ajoutée.
La dimension de l’inconscient collectif.
La vacuité ou néant, l’absolu inqualifiable.
La conscience absolue.
En résumé :
L’existence dépend du néant. La seule manière d’exister pleinement est de posséder la liberté de faire des choix. Pour cela, il est nécessaire d’être libre de son personnage mental, esclave d’une dynamique interne illusoire.
La liberté intérieure repose sur le néant, qui est l’absence de tout concept rigide ou définition limitante de soi, ainsi que de toute structure psychique défaillante.
Sans cette absence, il n’y a pas de véritable liberté. Et sans liberté, il n’y a ni discernement, ni capacité à faire des choix alignés avec les différentes strates de la conscience.
Sans discernement ni choix, l’individualité authentique devient impossible.
Le soi, ou « Je suis », est un projet infini, un devenir constant, qui requiert des choix multiples et des décisions guidées par la liberté intérieure. Cette liberté émerge du néant, de notre Véritable Nature.
Douzième bénéfice de l’introspection
La pratique de l’introspection vous aide à développer la capacité de focaliser votre attention sur plusieurs dimensions de la conscience simultanément. Pour ce faire, il est nécessaire d’observer les qualités inhérentes à chaque dimension et de comprendre comment elles influencent et interagissent dans votre vie.
Le processus d’introspection vous permet également de faire des choix et de prendre des décisions en accord avec la voix de votre être authentique. Il vous aide à échapper à l’influence des attentes et des conditionnements imposés par les autres, afin de vivre selon votre véritable autonomie.
Les choix de mauvaise foi contre soi-même
Certains choix s’inscrivent dans ce que Sartre appelle des projets de « mauvaise foi » – des choix faits contre soi-même. La mauvaise foi repose sur une autoduperie, un rejet de notre véritable nature pour adopter celle d’un « faux self », qui s’attache à des objets internes ou externes. Par exemple :
En rejetant leur véritable nature, les personnes dépendantes affectives et borderline dirigent leur attention vers un objet externe – une personne ou une relation qui leur semble essentielle pour exister.
À l’inverse, les psychopathes et les narcissiques concentrent leur attention sur leurs objets internes, s’enfermant dans leur propre monde psychique.
Ce sont des troubles de stress post-traumatique, qui partagent un même point commun : ils naissent de projets de « mauvaise foi » contre soi, fondés sur le rejet de la liberté intérieure et de notre véritable nature essentielle.
Treizième bénéfice de l’introspection
Grâce à l’introspection vous pouvez vous guérir de votre trouble de stress post-traumatique, qui a généré un trouble de la personnalité, que ce soit la dépendance affective, le narcissisme pathologique ou le trouble limite (borderline) ou autres.
L’autoduperie : le rejet du néant
Vous possédez la capacité d’accueillir le néant, source de liberté, d’authenticité, de responsabilité, et, en fin de compte, de votre véritable identité.
En acceptant le néant, vous pouvez :
Vous engager dans un projet authentique, sincère et fidèle à ce que vous êtes réellement.
Faire des choix et prendre des décisions qui reflètent vos aspirations profondes.
Développer un Soi sain, libéré des attachements à des rôles artificiels ou imposés.
Exemple : Si vous vous identifiez à un « personnage honteux » ou à toute autre identité façonnée par les attentes extérieures, vous vous enfermez dans des rôles rigides et des activités illusoires ou irréalistes dictées par le monde. Cela peut inclure une spiritualité qui, bien qu’elle semble protectrice, vous pousse à vous duper vous-même. Ce mécanisme vous entraîne dans un projet dissonant de « mauvaise foi » envers vous-même, conduisant inévitablement à l’inauthenticité.
En d’autres termes : Lorsque vous adoptez un « personnage » extérieur à votre véritable nature, vous vous mentez à vous-même. Cette autoduperie vous éloigne de votre être authentique et de votre liberté intérieure, en limitant votre capacité à faire des choix éclairés et autonomes.
Quatorzième bénéfice de l’introspection
La seule façon d’échapper à l’autoduperie est d’embrasser l’authenticité, en faisant des choix réalistes et éclairés guidés par le discernement.
Ces choix révèlent l’existence d’une conscience capable de percevoir à la fois la réalité factuelle et sa dimension transcendantale.
La transcendance de l’observateur mécanique
Le néant est la « substance unique » que seule la conscience humaine peut constater, car nous sommes les expressions mêmes de ce néant, de la conscience absolue, qui est l’observateur ultime. Métaphoriquement, nous devenons les « messagers » du néant, témoins de sa réalité ultime à travers ce constat.
Cependant, l’observateur de notre conscience limitée n’est qu’un observateur mécanique. Par son observation, il reproduit inlassablement les mêmes images, concepts, idées, mécanismes et objets internes. Dans un état d’inconscience, nous nous identifions autant à l’observateur qu’à ce qu’il observe. En conséquence, nous attirons à nous ce que l’observateur mécanique contemple.
Ce phénomène hypnotique rappelle l’interprétation de Copenhague en mécanique quantique, selon laquelle :
L’observation par l’expérimentateur détermine quand et comment une particule élémentaire se matérialisera.
L’observation influence directement le résultat, créant ainsi une interaction entre l’observateur et la réalité observée. Dans cette perspective, l’observation de l’expérimentateur « crée » son propre univers.
Cependant, si, au lieu de nous identifier à « l’observateur mécanique », nous portons une attention vigilante à notre activité mentale tout en focalisant notre attention sur notre respiration et notre force vitale, – qui ne sont pas de nature mentale – nous participons activement à la désidentification d’avec l’observateur mécanique et ce qu’il observe. Par ce processus, notre attention retourne à sa source originelle : le néant.
Quinzième bénéfice de l’introspection
Grâce à l’introspection, le néant devient accessible à ceux qui observent avec attention et discernement l’activité de leur mental.
Tout concept émerge et disparaît dans le vide, suivant un cycle constant de création et d’annihilation.
Cette dynamique révèle la conscience humaine comme un témoin actif de l’impermanence et de la fluidité de l’esprit.
L’introspection vous invite ainsi à embrasser ce dynamisme fondamental, où chaque pensée, idée ou définition naît et s’évanouit dans le néant.
La liberté de choix : le néant comme espace de création
Pour illustrer ce qui précède, prenons l’exemple de Viktor Frankl, psychiatre, neurologue et philosophe autrichien, qui a survécu pendant trois ans et demi dans différents camps de concentration. Malgré les conditions inhumaines qu’il a endurées, Frankl focalisait son attention sur le néant, sur sa véritable nature et sa liberté intérieure.
Étant l’un des grands penseurs du XXe siècle dans le domaine de la psychologie existentielle et humaniste, Frankl a fondé la logothérapie. Cette approche repose sur l’idée que le besoin fondamental de l’être humain est de donner un sens à sa propre vie.
Viktor Frankl a formulé trois principes essentiels :
Liberté de choix : Même dans les situations les plus extrêmes, les individus conservent la liberté de choisir leur attitude face aux circonstances.
Volonté de sens : L’être humain ressent un besoin fondamental de donner un sens à sa vie. Cette quête de sens est au cœur de son existence.
Besoin d’accomplissement de trois façons :
En réalisant un projet, un travail ou une action.
En vivant des expériences significatives ou en cultivant des relations significatives.
En adoptant une attitude positive face à une souffrance inévitable.
Frankl démontre que, même confrontés à une annihilation extérieure ou intérieure, nous possédons toujours une liberté ultime : celle d’embrasser le néant, non comme une absence, mais comme un espace infini de création et de transformation.
Seizième bénéfice de l’introspection
Le processus de l’introspection vous aide à :
Choisir la liberté intérieure, même dans des conditions défavorables.
Développer une résilience profonde face aux épreuves.
Cultiver la joie d’être « ce qui Est », même lorsque les circonstances extérieures sont difficiles.
L’introspection vous révèle ainsi que, quelles que soient les conditions, le pouvoir de choisir demeure l’expression ultime de votre essence et de votre liberté intérieure.
L’autonomie est possible par le constat du néant
Comme nous l’avons vu, le terme « néant » désigne la conscience indifférenciée, qui est en soi atemporelle, car elle est toujours présente, et préalable à la manifestation universelle. L’être humain qui constate le néant incarne pleinement son autonomie.
S’étant désidentifié des mécanismes automatiques et des conditionnements, il ne vit plus sous l’emprise de l’activité du « personnage » psychique.
Il n’est ni figé dans le passé, ni dans des projections empreintes de peur d’un futur fantasmé, trouvant ainsi un équilibre émotionnel et mental.
Il vit pleinement dans l’instant présent, ancré dans la conscience du néant, tout en élaborant des projets réalistes et en travaillant activement pour leur réalisation.
Contrairement à une personne qui vit dans le constat du néant, celle qui demeure identifiée à son « faux self » ou « personnage » focalise son attention sur :
Le passé, en restant enfermée dans les traumatismes et les expériences révolues.
Le futur, en anticipant et en réagissant à des projections mentales souvent irréalistes ou empreintes de peur.
Cette focalisation maintient l’individu dans une boucle autoréférentielle, le privant de l’accès à la conscience absolue, qui réside uniquement dans l’instant présent.
Dix-septième bénéfice de l’introspection
Grâce à l’introspection, vous :
Vivez pleinement dans l’instant présent, ancré(e) dans votre autonomie et dans le constat d’être ce qui Est.
Faites des choix, prenez des décisions et créez des projets réalistes.
Développez une capacité unique : celle de mener des projets à très long terme avec clarté, sérénité et discernement.
La déshypnose : une déprogrammation et une désidentification
Le processus de « déshypnose » consiste à :
Remettre en question l’identité mentale sur laquelle votre attention se focalise.
Désamorcer l’absorption et l’identification à ce « personnage » ou « fausse identité », qui est devenu le « principe organisateur » de votre vie.
Ce personnage est une construction mentale qui organise votre narration intérieure, mais il est également à l’origine de vos confusions, de vos souffrances, et d’un état d’autohypnose permanente.
Si, par exemple, le sens de votre vie repose sur une idée fixe : celle de trouver l’amour chez quelqu’un pour vous sentir exister, vous vivrez dans une compulsion de répétition, recréant sans cesse des schémas répétitifs. Vous resterez enchaîné(e) à des souffrances récurrentes, dictées par ces schémas.
Par le processus de déshypnose identitaire, vous réalisez que vous n’êtes pas ce « personnage souffrant » de votre propre rêve. Vous cessez de vous attacher aux croyances limitantes et aux mécanismes de survie qui maintiennent cette identité fictive. Ce personnage, bien qu’il semble réel, n’est qu’une illusion.
En revanche, le néant, qui est votre seule réalité, représente :
La base véritable à partir de laquelle vous pouvez exister.
L’accomplissement de vos élans profonds, libre des conditionnements et des illusions qui vous emprisonnent.
Le néant n’est pas un vide effrayant ; il est un espace infini où réside votre véritable nature votre liberté intérieure et votre créativité, ainsi que l’amour sans objet.
Dix-huitième bénéfice de l’introspection
Tout processus efficace d’introspection conduit à la réalisation de la conscience absolue, du nirvana, ou du néant – quel que soit le nom que vous lui donnez.
Ce processus marque :
La dissolution de vos traumatismes.
Une libération des illusions et des conditionnements qui voilent votre véritable nature.
Comprendre nos états hypnotiques
1. Votre identité mentale est un état hypnotique
L’idée que notre identité mentale produit un état hypnotique permanent repose sur le fait que, dans l’enfance, nous étions profondément identifiés à notre mère et influencés, voire contrôlés, par les pensées et croyances toxiques des adultes.
À l’âge adulte, nos réactions aux stimuli externes et internes découlent du « personnage » que nous avons adopté durant l’enfance pour nous protéger.
Nous continuons d’être influencés, voire dirigés, par nos pensées, nos croyances limitantes et nos conditionnements familiaux et sociétaux.
Nous vivons en mode automatique, réagissant aux stimuli sans véritable conscience critique. Nos actions sont guidées par des interprétations biaisées et des « pensées binaires » anxiogènes générées par notre fausse identité.
S’identifier à son « personnage mental » signifie se confondre avec ses idées, fantasmes, croyances, définitions et histoire personnelle, tout en reniant notre véritable nature indicible. Pourtant, cette nature est présente dans chaque nano-milliseconde, palpable dans la pulsation de notre cœur et dans le souffle de notre respiration.
2. L’identification aux définitions de soi est un état hypnotique
Les définitions de soi sont créées et observées par un mécanisme que nous appelons « l’observateur ».
Cet observateur, dans son rôle de juge, attribue constamment des étiquettes anxiogènes : « Tu es incorrect(e) », « Tu ne vaux rien », « Tu es incompétent(e) », « Tu es seul(e) au monde », « Tu n’as pas de place ici », « Tu es incomplet(e) », « Tu n’es pas digne d’être aimé(e) », etc.
L’identification à ces définitions engendre une hypnose permanente, maintenue en état de veille. Cependant, cette identification et cette hypnose disparaissent lorsque nous entrons dans le sommeil profond, car il n’y a plus d’observateur pour les confirmer.
3. Les rêves irréalistes sont des états hypnotiques :
La vie telle que perçue par votre personnage mental n’est qu’une illusion ou une mise en scène, semblable à un cauchemar. Pour cette raison, vous ressentez un vide intérieur qui vous pousse à faire des rêves irréalistes et à vous lancer dans une quête extérieure, afin de sentir le bonheur.
Identifié(e) à votre mental, vous vous confondez avec les pensées, concepts et définitions de votre « personnage », alors que ce que vous êtes réellement est indéfinissable.
La seule réalité est la conscience absolue, non différenciée, et tout le reste – pensées, concepts, définitions, désirs et la quête du bonheur – n’est qu’une illusion.
Dix-neuvième bénéfice de l’introspection
Le processus de l’introspection vous amenez à :
Vous réveiller de vos états hypnotiques, à cesser de vivre dans un cauchemar.
Constater vos ressources inattendues et vivre dans l’amour sans objet et la joie d’être.
Tout ce que vous cherchez se trouve déjà dans votre cœur. Par exemple, l’amour et la plénitude que vous cherchez à l’extérieur résident au cœur de votre Véritable Nature indicible.
Désidentification et déprogrammation
La déshypnose consiste à désapprendre les conditionnements qui vous maintiennent dans un état hypnotique limitant vos actions et leur efficacité.
C’est un processus de désidentification qui vous conduit à constater que vous n’êtes :
Ni vos pensées, ni vos croyances, ni vos associations ou interprétations.
Ni même votre identité, car elle est une construction purement mentale.
La déshypnose identitaire est une démarche introspective et contemplative qui vous permet d’observer le mental sans vous y attacher.
Elle est similaire à celle des traditions spirituelles visant à transcender le mental. Cependant, elle s’appuie également sur la philosophie de déconstruction postmoderne, offrant ainsi une approche contemporaine et rationnelle qui vous permet de vous réveiller du « personnage ».
Vingtième bénéfice de l’introspection
Ce processus mène à un constat de liberté, et vous offre les outils pour :
Déconstruire les croyances limitantes qui vous enferment dans des schémas répétitifs, vous empêchant de donner un sens à votre vie.
Reconnaître la nature illusoire de l’identité que vous avez adoptée à travers votre histoire personnelle et vos conditionnements.
Réaliser votre essence véritable, libre de toute définition mentale, ce qui vous permet de donner un sens authentique et profond à votre vie.
La déconstruction : une notion clé
Le philosophe français Jacques Derrida a marqué la philosophie des années 1960 et 1970 en devenant le pionnier de la déconstruction postmoderne.
Influencé par des courants tels que la phénoménologie de Husserl, la psychanalyse, la linguistique structurale, et la philosophie de Heidegger, Derrida a observé et remis en question les oppositions conceptuelles qui structurent notre pensée.
Il a analysé les concepts binaires, comme : Vérité / erreur, nature / culture, homme / femme, présence / absence.
Ces oppositions supposent une hiérarchie implicite, plaçant un terme au-dessus de l’autre. Par exemple, « homme » au-dessus de « femme » ou « raison » au-dessus du « corps ». Cependant, Derrida a montré que ces oppositions ne sont pas naturelles mais construites.
De plus, les deux termes dépendent l’un de l’autre pour leur sens, ce qui les rend instables et interdépendants. La déconstruction ne cherche pas à inverser cette hiérarchie, mais à révéler que ces oppositions sont des constructions mentales. Elles confirment nos conflits et contradictions internes.
Prenons l’exemple de la « vertu ».
Si la vertu est au centre de vos représentations linguistiques, vous pourriez inconsciemment créer un « personnage perfectionniste », d’apparence « bien intentionnée », qui perçoit la colère comme mauvaise ou terrifiante.
Si vous avez eu une mère narcissique pathologique, peut-être avez-vous juré de ne jamais exprimer votre colère comme elle. En refoulant cette colère, vous l’intégrez malgré tout dans votre cœur, nourrissant une rancune intérieure.
Ainsi, le personnage « impeccable » auquel vous vous identifiez dissimule une zone d’ombre, révélant que l’opposition entre vertu et colère n’est qu’une illusion.
Ces deux concepts binaires se renforcent mutuellement, générant une dynamique intérieure épuisante :
D’un côté, maintenir l’image d’une personne impeccable exige un contrôle constant et une vigilance accrue, souvent dictés par la peur du jugement ou du rejet, ou encore par un jugement intérieur sévère envers vous-même.
De l’autre, refouler votre colère crée une tension émotionnelle qui s’accumule et finit par s’exprimer de manière indirecte, sous la forme d’une « ire du cœur », d’une colère passive ou, dans certains cas, d’une dépression.
Cette lutte intérieure devient une prison mentale : elle vous piège dans une quête sans fin d’approbation – extérieure ou intérieure – tout en vous empêchant de reconnaître et d’accepter pleinement votre souffrance et la honte toxique cachée derrière votre colère, qui est pourtant souvent légitime selon les contextes, les situations ou votre vécu.
Derrida ne propose pas une méthode au sens classique, mais une démarche critique visant à :
Interroger nos « narratives intérieures », nos idées binaires et nos systèmes de pensée.
Mettre en lumière les contradictions internes des discours perçus comme universels ou cohérents.
Démontrer que nos concepts binaires (« bon / mauvais », « supérieur / inférieur », « femme / homme », etc.) ne définissent pas réellement ce que nous sommes.
En résumé, la déconstruction est une méthode qui examine nos récits pour dévoiler leurs présupposés implicites et leurs failles. Ce processus met en lumière l’instabilité inhérente au langage et à les significations, tout en ouvrant des espaces pour une réflexion renouvelée et constructive.
Vingt-et-unième bénéfice de l’introspection
La pratique de la déconstruction vous aide à :
Démanteler vos certitudes fondées sur des concepts binaires.
Explorer vos zones d’ombre et reconsidérer les idées ou croyances qui les renforcent.
Révéler ce qui semble occulte, souvent façonné par des jeux de langage.
En intégrant la déconstruction dans votre introspection, vous accédez à un outil puissant pour vous « déshypnotiser », libérant votre esprit des structures mentales qui vous emprisonnent et vous font souffrir.
Vos certitudes erronées sont des jeux de langage
La notion de « jeux de langage » fut introduite par le mathématicien, logicien et philosophe autrichien Ludwig Wittgenstein (1889-1951). Il explique comment le langage donne une apparence de vérité à notre pensée magique, induisant des illusions, des erreurs et des mensonges.
Wittgenstein nous invite à questionner nos certitudes et à observer comment le langage structure nos idées, souvent de manière illusoire. En décrivant avec précision les jeux de langage, il propose de mettre en lumière les limites de nos représentations linguistiques.
Il illustre ses observations avec des exemples simples, comme le mot triangle. Ce mot peut évoquer :
Une fenêtre triangulaire,
Le triangle des Bermudes,
Un instrument de musique,
Un panneau routier,
Ou encore une décoration de Noël.
Cela montre que chaque mot appelle des images et interprétations différentes, selon le contexte ou l’expérience de l’individu.
De même, des mots comme amour peuvent être confondus avec des notions opposées, telles que la manipulation, l’abus ou l’instrumentalisation, révélant ainsi les ambiguïtés intrinsèques des jeux de langage.
Explorer le processus de la pensée :
Wittgenstein propose de questionner le processus de pensée lui-même et son lien avec le langage. Voici quelques-unes de ses questions fondamentales :
Où se trouvent mes pensées ? Dans ma tête ? Comment le sais-je ?
Mes pensées m’appartiennent-elles ? Ou bien me viennent-elles d’autrui ?
Puis-je séparer une pensée du langage ? Peut-on réellement parler de quelque chose sans l’enfermer dans des mots ?
Une pensée en situation d’urgence est-elle instantanée ? Peut-on la verbaliser aussi vite qu’elle se manifeste ?
Quel jeu de langage se met en route lorsque je désire ou ai une intention ?
Observations clés sur le langage :
Les mots et les gestes sont contenus dans le langage lui-même : L’activité qui consiste à faire des associations entre les mots et les gestes pour donner du poids au langage et lui donner l’allure de la réalité, font partie du « jeu de langage ».
La confusion entre pensée et réalité : Nous nous hypnotisons en croyant que nos pensées sont réelles ou maîtrisables, alors qu’elles sont souvent des constructions mentales basées sur des fausses prémisses ou affirmations.
L’apprentissage du langage chez l’enfant : Montrer un objet tout en disant son nom installe la croyance que le langage reflète la réalité, alors qu’il ne fait que coder des conventions.
L’importance des contextes : Un mot isolé n’a pas de sens ; sa signification provient de son association avec d’autres mots, concepts, images ou gestes.
Les pensées ne sont pas contenues dans la tête : Wittgenstein critique l’idée que nos pensées se génèrent exclusivement dans le cerveau. *Voir son explication.*
Le langage et la réalité : La supposée connexion entre langage et réalité est fragile ; le langage exprime des perspectives, mais ne définit pas la vérité.
Les jeux de langage varient selon les contextes : Chaque situation ou état d’esprit influence les mots que nous utilisons.
*Ludwig Wittgenstein affirmait : « Une idée très bizarre, voire dangereuse, c’est que nos pensées se génèrent dans la tête ou à l’intérieur du cerveau, donnant à la pensée l’allure de quelque chose d’occulte ou magique et relevant pourtant de la responsabilité individuelle. Comment le processus de la pensée pourrait-il se propager d’un espace fermé, ma boîte crânienne, à un autre espace fermé qui est ta boîte crânienne ? Les psychanalystes et psychologues sont particulièrement sujets à cette illusion. »
Le langage comme mécanisme de défense :
Sam Vaknin soutient que le langage fonctionne comme un mécanisme de défense psychologique. En ce sens, il masque la réalité et agit comme un moyen de déni collectif.
Par exemple, réfléchir au néant à travers le langage est paradoxal, car ce dernier est enraciné dans une conscience limitée, qui constitue la cause première d’une pensée mécanique, figée dans le passé et façonnée par nos peurs.
Vingt-deuxième bénéfice de l’introspection
L’introspection vous permet de constater que le langage vous trahit, car il est construit autour de la conscience limitée. Ce processus introspectif vous aide à dépasser les illusions linguistiques pour accéder à une compréhension plus profonde de vous-même, au-delà des mots et des schémas figés.
La déconstruction n’est ni ordre ni chaos
Les êtres humains introduisent autant d’ordre que de chaos dans le monde. Le psychologue clinicien canadien et auteur, Jordan Peterson, est célèbre pour ses travaux en psychologie de la personnalité et ses réflexions sur l’ordre et le chaos. Dans son ouvrage « 12 Rules for Life: An Antidote to Chaos » (2018), il décrit ces concepts :
L’ordre : Il représente la sécurité, la structure et la prévisibilité. C’est le domaine des règles, des routines et des hiérarchies établies.
Le chaos : Il symbolise l’inconnu, l’incertitude et la nouveauté, mais aussi le potentiel créatif et les opportunités.
Pour Peterson, une vie épanouie nécessite un équilibre entre ordre et chaos, un principe appliqué aux dimensions externes, corporelles, émotionnelles et mentales de la conscience.
Cependant, le néant, ou la conscience absolue, précède toute tentative de créer un équilibre entre l’ordre et le chaos.
Le néant n’est pas un outil d’ordre : il n’a pas besoin d’ordre pour exister, car il est préexistant et inconditionné.
La conscience absolue n’appartient ni à l’ordre ni au chaos ; elle représente un processus de négation de tout ce que nous croyons être, qu’il s’agisse de notions ordonnées ou chaotiques, satisfaisantes ou insatisfaisantes.
Dans cette perspective, le néant transcende les oppositions binaires entre ordre et chaos, révélant une réalité plus fondamentale : ce que nous sommes réellement.
Vingt-troisième bénéfice de l’introspection
Le but de l’introspection :
Ne consiste pas à utiliser le chaos pour établir de l’ordre.
Il s’agit de faire le constat de votre véritable nature.
En dépassant la dualité ordre/chaos, l’introspection vous invite à explorer une réalité plus profonde, au-delà des mécanismes mentaux et des conditionnements sociaux.
Que se passe-t-il lorsque vous remettez en question quelque chose ?
Sam Vaknin, en s’inspirant de Sartre, explique que lorsque vous remettez en question quelque chose, vous supposez qu’il existe deux possibilités : une positive et une négative. Cependant, chaque acte de questionnement mène inévitablement à la déconstruction de ce que vous questionnez.
La déconstruction par l’autoquestionnement :
L’annihilation : Ce terme désigne le processus par lequel quelque chose est totalement détruit, anéanti ou réduit à néant.
Dans le cadre de l’autoquestionnement, ce sont nos concepts qui sont déconstruits, anéantis ou ramenés au néant.
Ce processus révèle que ce que nous sommes n’est ni positif, ni négatif, ni bon, ni mauvais, ni supérieur, ni inférieur, ni correct, ni incorrect.
Jean-Paul Sartre développe une idée similaire : chaque fois que vous questionnez quelque chose, que vous interrogez sa nature ou sa réalité, vous amorcez son annihilation.
Tout oscille entre l’être individuel – attaché à sa conscience individuelle – et le néant. Pour cette raison, le processus d’introspection nécessite du courage, parce qu’il exige de se détacher des contraintes déterministes et d’un contrôle qui semblent rassurant.
Alors que Sartre disait :
« Le nom de cette possibilité qu’a tout être humain de sécréter le néant, c’est la liberté. »
Pour Sartre, l’être humain est libre parce qu’il est capable de « sécréter le néant », en remettant en question sa vision limitée et les interprétations de son existence individuelle.
Lorsqu’une certitude est questionnée :
Le simple acte de poser une question introduit un doute.
Ce doute déplace l’individu du déterminisme vers l’incertitude et la probabilité.
Le questionnement fait osciller la pensée entre un « oui » absolu et un possible « non », ouvrant ainsi la voie à d’une nouvelle perspective.
Exemple : Imaginons que vous avez la certitude d’être un enfant blessé.
En questionnant cette certitude, l’acte même de la remettre en question introduit un doute : « Suis-je un enfant blessé ? » En doutant de la véracité de cette certitude, vous passez du déterminisme à l’incertitude, voire à la probabilité. Vous pourriez dire : « Probablement, je me sens blessé comme un petit enfant, mais suis-je réellement un enfant blessé ? Est-ce vraiment ce que je suis ? »
Ce questionnement fait osciller votre pensée entre un « oui » absolu et un possible « non ». C’est un processus profondément libérateur. Vous remarquerez que le besoin de contrôler votre destin en restant identifié à votre certitude « d’être un enfant blessé » se dissipe, ouvrant ainsi la voie à la sérénité dans l’instant présent.
Vingt-quatrième bénéfice de l’introspection
La notion de liberté chez Sartre repose non sur l’être individuel, mais sur le néant. Grâce à l’introspection :
Vous accédez à cette capacité de négation, source de votre liberté.
Vous explorez sans peur les implications de la négation, ce qui vous permet de transcender les limites imposées par vos conditionnements.
La conscience n’est pas du passé
Sam Vaknin explique : la conscience est un processus de devenir.
À chaque instant, la conscience n’est plus ce qu’elle était il y a une seconde.
À chaque micro-milliseconde, elle cesse d’être ce qu’elle était une nanoseconde auparavant.
La conscience n’est pas encore ce qu’elle va devenir.
Cela signifie que la conscience :
N’est pas un noyau immuable, une essence fixe et stable.
N’est même pas un processus invariant ; elle est perpétuellement changeante.
Le « personnage », en revanche, cherche à utiliser la conscience pour construire une identité stable et figée, un sentiment durable de « qui je suis ».
Mais cela est impossible :
Le personnage est toujours une construction du passé ; il est ce que vous étiez, et non ce que vous êtes.
Le passé est le contraire de la liberté, car il est figé par vos interprétations et vos croyances sur vous-même.
Même lorsque vous prétendez vivre dans l’instant présent :
Le présent est infinitésimal : il n’a ni longueur ni durée. Ce que vous appelez le présent devient immédiatement le passé.
Ainsi, le « travail sur soi » que vous croyez avoir effectué dans le passé n’est qu’une analyse rétrospective de ce que vous étiez, et non de ce que vous êtes.
C’est le même paradoxe pour le futur :
Vous ne coïncidez jamais avec ce que vous serez ou deviendrez.
Le futur est une projection mentale, tout comme le passé est une fixation mentale.
Le néant, en revanche, est ce qui est. Il représente l’unique réalité où la conscience peut exister en liberté : Le néant est ce qui Est et c’est votre seul avenir.
Vingt-cinquième bénéfice de l’introspection
L’introspection est l’avenir, car elle :
Vous invite à questionner vos interprétations du passé.
Vous permet d’explorer ce que vous avez cru sur vous-même à travers votre histoire.
Ouvre des possibilités nouvelles pour la liberté de la conscience, en se détachant de toute définition figée de soi.
Le néant est cet espace d’absence de toute définition, où la conscience est véritablement libre. (Et pourtant, dire cela, c’est déjà en dire trop.)
Notre choix : vivre dans le passé, dans le futur ou aucun des deux
Vos interprétations du passé constituent les définitions immuables de votre « personnage » – une construction mentale d’un « moi » qui vit dans l’illusion de séparation avec le néant.
Ce personnage figé engendre :
Des conflits mentaux.
Des dissonances et des incohérences illusoires, fixées dans le temps.
Des projections dans un futur fantasmé, où ces illusions persistent sous de nouvelles formes.
Sans l’identification à votre « personnage », votre avenir est déterminé par le néant, car :
Il ouvre la voie à des choix et des décisions à venir, non dictés par un passé figé.
Ces choix et décisions sont indissociables de la liberté, qui ne peut émerger que du néant : du rien, de l’absence de tout conditionnement.
La liberté véritable ne dépend pas des limitations imposées par un personnage construit à partir des interprétations passées. Elle émerge dans l’espace du néant où tout est possible.
Vingt-sixième bénéfice de l’introspection
La présence ou l’absence d’un « personnage » séparé de « ce qui Est » n’ajoute rien ni n’enlève rien au néant, à la conscience absolue.
L’introspection vous aide donc à transcender l’illusion d’un « moi » figé dans le passé et à embrasser un état de liberté véritable, où le néant devient la source infinie de toutes les possibilités.
La conscience introspective est le « Neti Neti »
La conscience est fondamentalement introspective, car elle nous conduit à la négation de tout ce que nous pensons être, par exemple lorsque nous nous définissons par rapport à un être aimé, et que celui-ci meurt. Ce processus nous mène alors vers le néant.
Cependant, nous pouvons accompagner ce processus en nous accrochant au devenir naturel de notre « Je suis », sans aucune définition ajoutée, à travers une double négation : « neti, neti ».
Cette expression sanskrite signifie littéralement « ni ceci, ni cela ». Elle constitue l’essence de l’Advaita Vedanta, une philosophie non dualiste.
Les trois grands maîtres indiens qui ont fait connaître la Non-dualité et l’introspection étaient Ramana Maharshi, Nisargadatta Maharaj et U.G. Krishnamurti.
U.G. Krishnamurti proposait cette réflexion : « Qu’est-ce qui vous empêche d’être dans votre état naturel ? Vous vous éloignez constamment de vous-même. Vous voulez être heureux soit en permanence ou au moins pour un instant précis. Vous n’êtes pas satisfait de vos expériences quotidiennes : il vous en faut de nouvelles. Vous voulez vous perfectionner, vous changer. Vous projetez votre effort vers la réalisation d’un personnage que vous n’êtes pas. Voilà ce qui vous éloigne de vous-même. »
Nisargadatta Maharaj disait : « Pour laisser aller quelque chose, il faut savoir ce que c’est. De la même façon que pour construire un puits il est nécessaire de creuser jusqu’à atteindre la source d’eau, pour demeurer dans votre Véritable Nature, il est crucial de laisser aller tout ce que vous croyez être et que vous n’êtes pas. »
Ramana Maharshi affirmait : « Toutes les voies spirituelles véritables ont pour seul but de déshypnotiser l’individu. » Le processus d’introspection proposé par lui commence par une question fondamentale : « Suis-je ? »
Pour une personne qui ne s’est jamais posé cette question, il est préférable de commencer par des interrogations plus concrètes : « Suis-je ceci ? » « Suis-je cela ? » « Ou ni l’un ni l’autre ? »
Par exemple :
Suis-je « l’objet interne maman » ? Suis-je l’observateur qui la regarde ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Suis-je les introjections de ses messages anxiogènes ? Suis-je l’observateur qui les regarde ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Suis-je les messages négatifs provenant de mes parents ? Suis-je l’observateur qui les regarde ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Suis-je les croyances erronées que j’ai adoptées à cause de mon histoire ? Suis-je l’observateur qui les regarde ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Suis-je l’enfant blessé ? Suis-je l’observateur qui le regarde ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Suis-je l’observateur jugeant ? Suis-je le « moi » jugé ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Suis-je l’observateur évaluant ? Suis-je le « moi » évalué ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Suis-je les diverses identités mentales datant de l’enfance ? Suis-je l’observateur qui les regarde ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Suis-je les fantasmes inconscients ? Suis-je l’observateur qui les regarde ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Suis-je les états hypnotiques ? Suis-je l’observateur qui les regarde ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Suis-je les mécanismes défensifs ? Suis-je l’observateur qui les regarde ? Ou ni l’un ni l’autre ?
Le fait de ne pas être « ni ceci, ni cela » ouvre un espace de « rien de tout », où seul le « Je suis » est. Cela constitue l’un des projets essentiels de la conscience. Toutes les ressources de l’individu sont consacrées à ce devenir, à ce Je suis qui n’est ni défini ni une construction fixe. Ce Je suis est une expression en perpétuel mouvement, telle la respiration ou l’énergie vitale. Si ce processus s’arrête, l’individu disparaît, mais la conscience, elle, demeure.
Vingt-septième bénéfice de l’introspection
L’introspection du « neti, neti » permet de reconnaître cette vérité essentielle : « Vous ne pouvez pas ne pas être. »
Vous n’avez pas besoin d’être « l’expérimentateur » du « moi » pour être ce qui Est.
Vous n’avez pas besoin d’être « l’observateur » du « moi » pour être ce qui Est.
Vous n’avez pas besoin d’être « le percevant » du « moi » pour être ce qui Est.
Vous n’avez pas besoin d’être « le connaisseur » du « moi » pour être ce qui Est.
Il n’y a pas des conditions pour être ce qui Est. Même dans le sommeil profond, où il n’y a ni observateur, ni évaluateur, ni percevant, ni expérimentateur, ni connaisseur du « moi », ce que vous êtes demeure ce qui Est.
Et « ce qui Est », c’est le néant.
Le « Je suis » : la première pulsation du néant
Nisargadatta Maharaj, suggérait cette pratique introspective : « Traquez le sens de « Je suis ». Tenez-vous à lui, concentrez-vous dessus, jusqu’à ce qu’il disparaisse et qu’il vous mène au-delà de l’esprit. »
Voici un poème qui exprime cette quête du « Je suis » :
Ce que je suis
Ce que je suis est inexplicable et indéfinissable.
Préalable au substratum de toutes les formes visibles ou invisibles,
à l’expression de l’intelligence de tous les océans,
de tous les continents et de tous les espaces, je suis ce qui Est.
Ce que je suis est le mystère des mondes visibles et invisibles,
la condition essentielle à la pulsation de tout ce qui existe.
Ce que je suis est préalable à l’immanence et à l’omniprésence,
à l’existence elle-même qui s’exprime par la respiration des corps, des formes et des univers.
Ce que je suis est préalable à l’expression vibratoire de la vie qui va à la rencontre de la vie.
Ce que je suis est au cœur du mystère du néant et de toutes les formes,
des expressions visibles et invisibles qui émergent du néant.
Ce que je suis est l’amour sans objet ni localisation.
Ce que je suis est sans matière ni contenu, sans localisation ni distance, sans lumière ni obscurité.
Ce que je suis est la condition pour que cet instant se déploie.
Ce que je suis est la méditation en soi, préalable à celui ou celle qui croit méditer.
Ce que je suis n’est ni à l’intérieur ni à l’extérieur du corps.
Ce que je suis ne naît ni ne meurt.
Ce que je suis n’a ni le cœur fermé, ni le cœur ouvert.
Ce que je suis n’arrive ni ne part.
Ce que je suis n’est ni éternel ni éphémère.
Ce que je suis n’est ni fini ni infini, ni immense ni petit.
Ce que je suis n’est ni le verbe ni le son transmis, ni la vie, ni la mort.
Prabhã Calderón