Le fantasme partagé des narcissiques
11 juin 2025
Sam Vaknin
Cet article — revisité et enrichi — propose un résumé de diverses conférences magistrales du Professeur Sam Vaknin sur le fantasme partagé des narcissiques, disponibles sur sa chaîne YouTube ainsi que sur son site vaknin-talks.com. J’y ai intégré une description des réactions des victimes face à ce piège hypnotique, redoutable et destructeur. Pour des raisons pratiques, l’article est rédigé au masculin.
L’objectif inconscient de tout narcissique pathologique est de vous utiliser pour se détacher de sa mère sur le plan psycho-émotionnel, afin d’évoluer enfin vers son autonomie et sa souveraineté, et ressentir son existence et son altérité pleinement séparée d’elle.
En transférant sur vous l’image de cette mère qui l’a empêché d’être lui-même, il recrée avec vous son conflit avec elle, vous transmet son traumatisme, et détruit ainsi votre intégrité psychique à travers son fantasme partagé.
À propos du fantasme partagé, le Professeur Vaknin déclare :
Le narcissisme pathologique se manifeste par une compulsion de répétition écœurante.
Il s’agit d’une mécanique inexorable qui se déclenche chaque fois qu’un narcissique pathologique croise une personne susceptible d’être sa source d’approvisionnement narcissique, ainsi que d’être exploitée dans les moindres strates de sa conscience.
Au fur et à mesure que vous partagez avec un narcissique pathologique les multiples facettes de votre identité, de votre vie — vos activités, vos décision, votre efficacité, votre autonomie personnelle, votre indépendance, vos cognitions, vos émotions — une prise de contrôle hostile se produit : la mécanique inexorable de son fantasme partagé enclenche une série d’étapes totalement prévisibles, qui rejouent les dynamiques de son enfance.
Le cycle du fantasme partagé se déploie ainsi :
Le narcissique pathologique commence par vous repérer parmi ses contacts ou au fil de ses interactions sociales. Son regard, ses gestes, attitudes et comportements produisent en vous une réaction troublante : la vallée de l’étrange.
Il vous scanne ensuite et vous auditionne afin de déterminer si vous pouvez devenir une source potentielle d’approvisionnement narcissique et être intégré(e) à son fantasme partagé.
Si vous réussissez cette épreuve silencieuse, vient alors la phase du bombardement amoureux, où il vous inonde de promesses et de sentiments factices, vous plongeant dans un tourbillon de fabulations — des mensonges auxquels lui-même croit.
Il idéalise alors l’objet interne qu’il construit de vous dans son esprit, à partir de clichés instantanés capturés par sa dynamique mentale.
Ensuite, il vous érige en figure maternelle parfaite et salvatrice, censée combler ses manques et résoudre le conflit archaïque qu’il entretient avec sa mère.
Mais bientôt, l’image idéalisée vacille : pour se séparer symboliquement de sa mère, il commence à dévaloriser l’objet interne qu’il avait façonné.
Il en vient ensuite à vous dévaloriser également en tant qu’objet externe — vous. Cela passe par le dénigrement, l’humiliation, le mépris, et des agressions ouvertes ou passives.
La relation — qui n’en fut jamais véritablement une — s’achève dans un rejet d’une cruauté glaciale. Il vous remplace sans état d’âme, vous réduisant à une simple variante interchangeable.
Ou bien, il tente de vous récupérer s’il n’a pas atteint l’apaisement intérieur qu’il recherchait en vous. C’est une relance narcissique bien connue : le hoovering.
Les neuf phases de ce fantasme inconscient exercent une emprise profondément hypnotique sur les victimes, altérant leur perception de la réalité intérieure et modifiant leur monde extérieur.
Elles ouvrent ainsi la voie à l’abus narcissique dans toute sa cruauté insidieuse. Comprendre ces étapes permet d’anticiper l’évolution dramatique de la relation et, parfois, d’en sortir avant que l’abus narcissique ne les détruise complètement.
L’abus narcissique
Le Professeur Sam Vaknin a introduit le concept d’abus narcissique en 1995. Voici la définition qu’il en donne :
L’abus narcissique se manifeste sous une multitude de formes de maltraitance : verbale, physique, sexuelle, psychologique, émotionnelle, familiale, domestique, professionnelle, éducative, sociale, juridique et financière.
Il s’agit de l’unique forme d’abus qui investit simultanément toutes ces sphères, s’infiltrant dans chaque strate de la conscience de la victime.
L’abus narcissique poursuit un objectif précis, bien qu’il ne soit pas toujours animé par une intention pleinement consciente.
Son but est d’anéantir la victime en tant qu’individu autonome et interdépendant, afin de la remodeler, de la recréer comme une simple extension du narcissique lui-même — un objet interne, une introjection entièrement contrôlable et manipulable à volonté.
La négation de son existence distincte et l’effacement de son individualité, constituent le cœur même de l’abus narcissique. Aucun autre type d’abus ne pousse cette logique de destruction identitaire à un tel degré. L’abus narcissique demeure, dès lors, l’une des expériences les plus obscures et les plus dévastatrices qu’un être humain puisse traverser.
Cependant, nous devons prendre pleinement conscience de ce que le professeur Sam Vaknin n’a cessé de répéter…
Le narcissique agit avec un but, mais sans intention consciente
Ses actions, ses comportements, son contrôle et ses abus ont un sens et un but inconscients, mais ils ne sont pas intentionnels au sens strict.
L’abus psychopathe est orienté vers un but précis, il est intentionnel, prémédité et délibéré.
L’abus narcissique, quant à lui, vise un but, mais il n’est pas intentionnel. Les actions sont motivées par des dynamiques et des processus psychiques inconscients. Elles ont une finalité, mais elles n’émanent pas d’une intention consciente.
Selon les observations du célèbre psychanalyste Otto Kernberg, le trouble de la personnalité narcissique ou narcissisme pathologique est un proche « cousin » de la psychose.
Le narcissique pathologique est semblable à une machine programmée à l’avance, pleine de bugs et de dysfonctionnements. Il transporte en lui ce programme, qu’il répète inlassablement. C’est sa compulsion de répétition.
Il est parfaitement conscient de ce qu’il fait et peut choisir entre le bien et le mal, mais il s’en moque. En prison, en revanche, il contrôle parfaitement ses comportements. C’est pourquoi il doit être tenu pour responsable de ses actes — à la fois sur le plan pénal et moral.
Cependant, en raison de son inconscience, il répète toujours les mêmes comportements : il blesse, il abuse, il tourmente, il exploite, il détruit les autres… Mais il est incapable de vous dire pourquoi. Il ignore ses motivations profondes et ses dynamiques internes. Il est totalement déconnecté de sa réalité intérieure, ainsi que de la réalité extérieure.
Cela dit, entamons l’étude de sa dynamique interne à travers les différentes phases de son fantasme partagé. Chacune d’elles vous permettra de prédire l’évolution de votre relation avec une personne narcissique pathologique.
Première phase : repérer et évaluer
Lorsque vous croisez pour la première fois la route d’un narcissique pathologique, vous êtes confronté(e) à un séducteur redoutable. Selon sa nature, sa stratégie de séduction varie :
Le narcissique somatique capte votre attention par ses attraits physiques : sa beauté, son apparence soignée, son style vestimentaire recherché ou son charme manifeste.
Le narcissique cérébral mise sur sa supposée sagesse, sa culture ou son intelligence, cherchant à vous impressionner par la profondeur de ses connaissances.
Le narcissique caché adopte une posture de pseudo-humilité : il se montre timide, serviable, presque effacé, et suscite votre empathie par ses yeux tristes et son besoin silencieux d’attention ou de secours.
Mais peu importe son type de narcissisme, un automatisme aussi fascinant qu’inquiétant s’enclenche instantanément et inconsciemment en lui :
Il vous observe et vous repère avec une acuité presque animale, instinctive. Il juge si vous pouvez devenir une source de provision narcissique, et l’objet à qui il fera endosser le rôle prévu par la mécanique inexorable de son fantasme partagé.
Ainsi, dès cette phase de repérage et d’évaluation, le narcissique vous fixe, vous scrute, vous analyse et vous observe avec une attention soutenue. Son « scanning », qui est totalement incontrôlable et inconscient est intrusif.
La réaction de la vallée de l’étrange
Face au narcissique pathologique et à sa manière de vous regarder, vous ressentez une sensation étrange, décrite comme la vallée de l’étrange.
Il s’agit d’un concept développé par le roboticien Masahiro Mori. Il désigne le sentiment de malaise que nous éprouvons face à des robots humanoïdes dont l’apparence et les comportements ressemblent trop à ceux des êtres humains. Le narcissique pathologique provoque ce même type de sensation.
Dans ce cas, il est vivement conseillé de faire confiance à votre intuition, de vous retirer, d’éviter le contact visuel, de vous éloigner ou de vous entourer d’autres personnes.
Ce malaise, cet inconfort — ce sentiment que quelque chose ne va pas, que quelque chose cloche, que quelque chose est déréglé — provient du fait que le narcissique pathologique est un être humain inachevé. Il est comme un humanoïde : une simulation incomplète, imprécise et inexacte d’un être humain. Il lui manque l’accès aux émotions positives comme l’amour, l’empathie affective et émotionnelle, ainsi que la compassion.
Ce sont précisément ces manques qui déclenchent la réaction de la vallée de l’étrange chez les personnes en contact avec le narcissique manifeste, et plus encore avec le narcissique caché.
Mais, à quel moment exact la réaction de la vallée de l’étrange se produit-elle ?
Selon certaines études menées à Harvard, à l’institut Lombardi et ailleurs, elle survient dans les 30 premières secondes d’exposition au narcissique — que ce soit à travers son regard, tel une flèche dirigée vers vos yeux, ou bien via une simple photo, une vidéo, ou un e-mail.
Il ne s’agit pas d’un « coup de foudre ». Ce dernier provoque une attirance intense envers quelqu’un qui vous fait vous sentir amoureux(se). Mais dans le cas d’un narcissique pathologique, c’est son étrangeté et son regard qui vous attirent violemment.
La vallée de l’étrange émerge également dès les premières interactions, en raison d’attitudes telles que la retenue, un regard dominateur et contrôlant, des réponses émotionnelles inadaptées, des réactions infantiles franchement étranges, des gestes déplacés, des phrases hors contexte, un discours saturé de « moi » et de « je », ou encore une interaction globalement teintée d’anxiété.
Si vous vous engagez dans la relation, vous percevrez un climat émotionnel négatif, à la fois diffus et palpable, générant une tension intérieure et un inconfort constant.
Observez vos réactions avec du recul avant de vous engager
Vous pourriez être influencé(e) par votre besoin d’amour. Ne vous fiez pas trop à vos interprétations. Écoutez plutôt votre intuition et votre instinct : selon certaines études, ils ont raison dans près de 90 % des cas. Si vous vous sentez mal à l’aise en présence de quelqu’un, ou si vous pensez être tombé(e) amoureux(se) immédiatement, prenez de la distance. C’est un signal d’alerte.
Votre première impression du narcissique est négative.
Pourtant, vous la réprimez, la niez, puis la remplacez par une impression positive. Pourquoi ?
Parce que vous êtes en proie à une dissonance cognitive : il vous semble inapproprié d’être critique d’emblée, et vous pensez que c’est plus acceptable de lui accorder le bénéfice du doute.
Ce sont alors vos défenses autoplastiques qui s’activent, et vous vous sentez coupable. Donc, vous vous dites : « Quelque chose ne va pas chez moi. Cette personne est bien, très attractive et intéressante, etc. »
En plus, vous avez besoin d’une relation — pour ne pas vous sentir seul(e), pour apaiser une anxiété, une dépression, ou combler un manque sexuel.
Il s’agit donc de votre propre dynamique interne, non de la sienne. Vous vous engagez dans une relation fondée — non sur la réalité — mais sur vos manques affectifs, vos fantasmes et votre pensée magique.
Deuxième phase : scanner et auditionner
Dans cette phase, le narcissique pathologique vous observe en silence, vous auditionne et vous scanne à l’aide de son empathie froide — strictement cognitive — dépourvue de véritable affect. Il vous soumet alors à trois tests implicites, tout en se posant, en arrière-plan, plusieurs questions importantes à ses yeux.
1. Êtes-vous idéalisable ?
Il écoute le ton de votre voix, observe votre corps, votre apparence, vos mouvements, votre gestuelle, vos centres d’intérêt, votre profession, vos traits de caractère, vos atouts personnels… Tout devient pour lui un support potentiel à la construction d’une image idéalisée de vous.
2. Quels services pouvez-vous lui offrir ?
Il évalue si vous êtes en mesure de fournir au moins deux des quatre types de services qu’il exige, sa logique étant fondée sur l’exploitation :
Sur le plan de la sécurité :
« Puis-je lui faire confiance ? A-t-elle (ou a-t-il) une tendance addictive ? Prendra-t-elle (ou prendra-t-il) plaisir à prendre soin de moi ? Est-elle (ou est-il) vulnérable au fantasme partagé ? Quelles sont ses caractéristiques attendrissantes, quelque peu immatures ou infantiles, susceptibles de déclencher des réflexes maternels et protecteurs ? »
Sur le plan sexuel :
« Peut-elle (ou peut-il) répondre à mes attentes ? Pourrai-je satisfaire mon autoérotisme ? Est-elle (ou est-il) irrésistible, enthousiaste, consentant(e) et soumis(e), enclin(e) aux fantasmes sexuels, sans limites, porté(e) sur le fétichisme ou la promiscuité ? »
Sur le plan des services pratiques :
« Peut-elle (ou peut-il) cuisiner et assumer les tâches ménagères ? Comment puis-je l’exploiter concrètement ? Peut-elle me soutenir matériellement ? Répondra-t-elle à mes besoins sans limites ? Puis-je accéder à ses ressources financières ? Jusqu’où puis-je compter sur elle (ou lui) ? »
Sur le plan de la provision narcissique :
« Est-elle (ou est-il) capable de m’admirer, de m’idolâtrer, de renforcer mon sentiment de supériorité et d’exception ? Est-elle (ou est-il) adorateur(trice), non critique, soumis(e), docile, masochiste, auto-dépréciatif(ve) ? »
3. Quelle est votre vulnérabilité psychologique ?
Il tente de détecter les failles suivantes :
« Est-elle (ou est-il) brisé(e), abîmé(e) ? Est-elle (ou est-il) empathique ? Romantique ?
Montre-t-elle (ou montre-t-il) un besoin d’amour, un déficit affectif ? Vit-elle (ou vit-il) dans un univers de rêves et de fantasmes ? Fuit-elle (ou fuit-il) la réalité ? »
Si ces critères sont remplis, vous vous insérerez aisément dans son fantasme partagé. Plus tard, il accédera alors à sa provision narcissique sadique, se nourrissant de la souffrance émotionnelle qu’il vous infligera — se prouvant ainsi sa propre toute-puissance, son omniscience et, dans son délire, sa dimension quasi divine.
Dès le début, il vous fait penser que vous avez réussi un test de sélection, et que vous êtes unique à ses yeux — alors qu’en réalité, il ne s’intéresse qu’à lui-même et à ses propres besoins. À travers ces tests, le vide intérieur du narcissique transparaît : il n’existe qu’à travers l’autre.
Résonance des blessures archaïques
Le narcissique pathologique est un enfant dont le développement psycho-émotionnel s’est brutalement arrêté entre 2 et 4 ans. Son histoire d’abus et d’instrumentalisation a généré en lui un investissement émotionnel inconscient dans la mère qui l’a empêché d’évoluer.
Par conséquent il n’a pas pu se séparer d’elle et s’individualiser, afin d’évoluer vers son autonomie psychoaffective et émotionnelle et sa souveraineté. Pour survivre, il a sacrifié son être authentique et offert son cœur à un dieu protecteur devenu son faux self. Pour comprendre son vécu, lisez cet article : Le syndrome de l’otage chez les enfants.
Aujourd’hui, adulte, il sacrifie votre cœur à son faux self. Il utilise votre « enfant intérieur » comme un piège émotionnel. Inconsciemment, il recherche la résonance de blessures archaïques pour construire, avec vous, son fantasme partagé.
Il cherche en vous quelqu’un de prêt à se battre pour la relation, à l’image de ces couples qui restent ensemble pour les enfants ou pour leur maison — formant ainsi un duo de deux orphelins perdus dans les bois sombres, à la manière d’Hansel et Gretel dans le conte des frères Grimm. Ce type de couple maintient une régression infantile permanente, où le vrai Soi et l’autonomie n’émergent jamais.
Troisième phase : le bombardement amoureux
Si vous avez franchi avec succès ses premières évaluations, tout devient soudain intense, fusionnel et irréel. Le narcissique déclenche alors un bombardement amoureux hypnotique — une phase exaltante durant laquelle il vous inonde d’attentions et d’affection.
S’il commence déjà à idéaliser l’image qu’il s’est construite de vous, il multiplie les gestes bienveillants, les petites attentions, les marques d’intérêt — toutes destinées à soigner le terrain de son fantasme partagé. Son regard posé sur vous semble chargé d’une admiration sans limites, comme si vous étiez devenu(e) une divinité.
Vous êtes enveloppé(e) dans une atmosphère de confort, d’acceptation totale, de reconnaissance et d’amour absolu. Il semble vous écouter avec une attention rare, se montre disponible, compréhensif et intuitif — vous donnant l’impression qu’enfin, quelqu’un vous voit, vous accepte et vous comprend profondément, peut-être comme jamais auparavant.
Par ce jeu de miroirs, non seulement vous commencez à l’idéaliser, mais surtout, vous vous idéalisez vous-même à travers son regard. Vous devenez, à ses yeux et bientôt aux vôtres, une version sublimée de vous-même. C’est ainsi que s’installe peu à peu une dépendance affective puissante et insidieuse.
Le bombardement amoureux poursuit plusieurs objectifs stratégiques :
Préparer le terrain à l’idéalisation mutuelle, où chacun projette sur l’autre des qualités surdimensionnées.
Créer un « objet interne idéalisé », une représentation fantasmatique de vous, façonnée selon ses propres besoins infantiles.
Tester votre propension à l’idéaliser, à succomber à ses charmes et à pénétrer progressivement dans le monde illusoire de son fantasme partagé.
Et, plus important que tout, opérer le transfert de l’image de sa mère nourricière sur vous, tout en vous transformant en objet interne.
La photo instantanée qu’il fait de vous
Si vous êtes une personne susceptible de croiser un narcissique au quotidien, que ce soit au travail, parmi vos contacts sociaux ou sur une application de rencontre, il est essentiel de comprendre que, pour le narcissique, il n’existe aucune distinction entre sa vie imaginaire et la vie réelle. Il présente des troubles de l’évaluation de la réalité ainsi que des déficits cognitifs très profonds
Pourquoi ? Parce que dans le narcissisme pathologique, les défenses psychiques et les mécanismes de survie reposent essentiellement sur des fantasmes.
Ainsi, le narcissique prend une photo instantanée de vous, une image mentale qu’il transforme en un « objet interne » conçu pour ne jamais l’abandonner — c’est la projection de l’un de ses fantasmes.
Par la suite, il n’interagit plus avec vous en tant que personne réelle, mais avec cet avatar, représentation mentale ou introjection devenue son objet interne — incarnant un autre fantasme fondamental.
Dorénavant, il idéalisera cet objet interne, avant de le dévaloriser, puis de le rejeter. Vous deviendrez sans doute la victime de cette dynamique fantasmatique.
Quatrième phase : l’idéalisation mutuelle
L’objectif de l’idéalisation est d’établir une relation non pas avec vous, mais avec l’objet interne qu’il a fabriqué à partir de votre image. Il ne s’agit pas de vous. Il s’agit de ce qu’il croit que vous êtes. Le narcissique pathologique introjecte cette image idéalisée, puis l’incorpore pour en faire une extension de son propre monde intérieur infantile.
Pour vous intégrer à son fantasme partagé, il déploie un véritable pouvoir hypnotique, synchronisant vos ondes cérébrales avec les siennes. Par ses paroles, ses intonations de voix, ses gestes, son contact physique, ses regards et même ses odeurs, il installe progressivement une résonance entre vos deux cerveaux.
Sous l’effet de cette induction hypnotique, votre dopamine s’emballe, générant un état d’euphorie : la vie prend soudain des couleurs éclatantes. Vous vous sentez exalté(e), grisé(e), transporté(e) dans un bonheur inattendu.
Mais derrière cette euphorie, cette synchronisation cérébrale lui permet d’envahir insidieusement votre psychisme, de projeter en vous son propre traumatisme, et de façonner peu à peu votre perception. Vous devenez alors malléable, façonnable à volonté.
Son labyrinthe de miroirs
Le psychisme du narcissique s’apparente à un labyrinthe de miroirs. Dans cette phase d’idéalisation, il vous tend sans cesse des reflets magnifiés de vous-même.
À travers ses paroles — « Tu es parfait(e), brillant(e), magnifique, unique… Je n’ai jamais vécu une telle connexion auparavant… Je t’aime comme jamais je n’ai aimé… Je serai toujours là pour toi… Tu peux compter sur moi » — il vous attire dans sa toile, et rapidement, il évoque des projets de vie commune, précipite la relation et accélère la fusion. C’est sa synchronisation d’ondes cérébrales.
Très vite, vous devenez dépendant(e) de cette idéalisation. Car peut-être, pour la première fois, vous expérimentez une acceptation totale. Il ne vous demande rien, n’émet aucun reproche. Vos défauts, vos erreurs, vos failles disparaissent sous son regard : vous êtes devenu(e), à travers lui, parfait(e), irréprochable, presque divin(e).
Dans cet espace qu’il vous offre — et qui donne l’illusion de sécurité — vous vous autorisez enfin à exister, à vous aimer, et à vous accepter tel(le) que vous êtes. Désormais, vous formez avec le narcissique une entité fusionnelle à deux têtes, vivant dans une symbiose paradisiaque où la séparation semble impossible.
Emporté(e) par cette exaltation, vous vous abandonnez au narcissique sans condition ni réserve. Car c’est à travers son regard que vous continuez à vous aimer ainsi.
Sans lui, vous êtes saisi(e) d’un vide angoissant, d’une sensation d’abandon, d’un manque insupportable d’amour. Il détient désormais la clé de votre propre idéalisation.
L’aveuglement de l’exaltation : l’effet miroir
En vous contemplant dans le miroir de son esprit, vous vous voyez en roi ou en reine, unique, exceptionnel(le), au-dessus de la norme : c’est là l’effet miroir.
Ainsi, ce n’est pas tant le narcissique lui-même que vous aimez : c’est la manière dont il vous fait vous sentir aimé(e), valorisé(e), accepté(e).
Vous tombez amoureux(se) non seulement de lui, mais surtout de la personne idéale que vous croyez devenir à ses côtés, de l’image magnifiée de vous-même qu’il vous renvoie, et du lien fusionnel qui vous unit — ce lien qui vous rassure, vous apaise et nourrit votre bonheur provisoire.
L’idéalisation opérée par le narcissique est à la fois hypnotique et addictive, car elle réactive inconsciemment les premières étapes de votre existence, lorsque bébé votre identité se construisait à travers le regard de votre mère. C’est pourquoi vous régressez en âge.
En contemplant l’image magnifiée de vous-même dans les yeux du narcissique, vous êtes saisi(e) par une hypnose régressive, vécue comme un véritable coup de foudre émotionnel. Vous commencez à croire qu’il est votre « âme sœur ». C’est une sensation océanique fascinante.
Convaincu(e) qu’il vous comprend mieux que quiconque, vous pensez partager des blessures semblables issues de l’enfance. Vous placez en lui votre confiance, votre foi en ses promesses, et vous vous mettez à rêver d’une relation fusionnelle capable de structurer et d’équilibrer enfin votre vie.
Aveuglé(e) par cette euphorie, vous ne percevez pas encore les dynamiques destructrices qui se mettent insidieusement en place. Au départ, vous devenez sa mère, sa servante, son esclave, sa thérapeute, son sauveur… Et plus tard, son objet persécuteur rejetable.
Vous devenez son « objet interne » ou avatar
Le narcissique pathologique n’a jamais franchi l’étape infantile de la séparation et de l’individuation. Par conséquent, comme un petit enfant, il est incapable de distinguer clairement ses représentations mentales de la réalité extérieure. Il confond ses objets internes, qui ne sont que des constructions psychiques, avec les personnes réelles de son entourage.
Il capture ainsi une image de vous, qu’il intériorise et transforme en objet interne idéalisé. Vous devenez, à ses yeux, un avatar parfait, entièrement sous son contrôle psychique. Absorbé dans cette image idéalisée de vous, il est incapable de vous voir véritablement.
Vous disparaissez, car il ne perçoit ni votre altérité ni votre existence propre. Vous êtes exclu(e) de toute relation réelle, car son attention se tourne exclusivement vers son avatar, cet objet psychique qu’il a façonné à partir de votre image.
Dès lors, à ses yeux, vous cessez d’exister comme un individu autonome pour devenir sa construction mentale façonnée selon ses besoins, ses projections et son usage.
Son absence psycho-émotionnelle
Bien que l’avenir puisse vous sembler très prometteur avec cette personne, la réalité est que le narcissique pathologique vit dans ses propres fabulations, auxquelles il croit sincèrement, en raison d’une structure psychique profondément infantile.
Malheureusement, vous remarquerez bientôt que ses émotions sont essentiellement négatives : il ne ressent ni véritable amour, ni compassion, ni empathie. Cette carence affective émerge d’un déficit d’autonomie psychoaffective.
Sa mère, elle-même figée dans son propre développement émotionnel, n’a pas su soutenir l’émergence d’une véritable autonomie chez son enfant. En conséquence, sa structure psycho-émotionnelle ainsi que les fonctions essentielles du moi ne se sont jamais pleinement constituées. Son noyau identitaire est schizoïde, et son identité n’est qu’une absence.
Faute d’un ego fonctionnel, il est incapable de concevoir que vous êtes un être distinct, porteur de votre propre histoire, de vos besoins fondamentaux, de vos aspirations, de vos valeurs et de vos limites psychoaffectives.
Incapable de respecter votre individualité, il vous façonne selon ses besoins, vous assignant un rôle dans sa dramaturgie intérieure. Vous devenez ainsi à la fois l’extension de son identité et la nouvelle « mère », chargée inconsciemment de solder les conflits irrésolus avec sa mère originelle. C’est autour de cette nouvelle fusion que s’organise son fantasme partagé.
Ainsi, que ce soit par l’amour que vous lui témoignez ou par la douleur que son absence psycho-émotionnelle génère en vous, il vous soutire la provision narcissique nécessaire pour exister — non pas en tant qu’être vraiment humain, mais en tant que faux self.
Pour comprendre la provision narcissique cliquez sur ce titre : La provision narcissique.
Il s’approprie vos qualités en vous « digérant »
Pour les raisons décrites préalablement, le narcissique ne vit que dans son mental, enfermé dans son délire de grandeur, ses récits illusoires et ses fantasmes. Psychologiquement parlant, il vous arrache le cœur pour l’offrir en sacrifice à son dieu protecteur — son faux self. Puis, il s’approprie vos qualités en les intégrant à l’avatar qu’il a façonné à partir de votre image.
Le Professeur Sam Vaknin illustre ce processus à travers une légende saisissante :
Dans les sociétés païennes anciennes, les prisonniers de guerre étaient dévorés, car les guerriers croyaient acquérir leur force et leurs qualités en les digérant.
Ainsi, il vous massacre et vous dévore psychiquement, tout en idéalisant à un degré quasi divin l’objet interne qu’il a construit à partir de votre image, afin de s’approprier vos qualités en vous digérant. Ce faisant, il s’idéalise lui-même et se perçoit comme divin.
Votre conditionnement mental agit contre vous
Votre propre conditionnement d’enfance vous rend vulnérable aux traitements du narcissique. Par exemple, si l’un de vos parents était lui-même narcissique, il vous a façonné(e) comme une extension de lui-même, déposant en vous les germes de sa propre pathologie. Votre identité est alors restée attachée à une fusion toxique, vous empêchant d’évoluer vers votre autonomie, de construire une véritable structure psychique ou un ego solide.
Si la dynamique de votre enfance n’a pas été transcendée, vous continuez à vivre dans un état hypnotique, peut-être marqué par un syndrome dissociatif, qui vous laisse un sentiment persistant de vide intérieur. Vous pensez avoir besoin d’un(e) partenaire intime pour vous sentir entier(ère), comblé(e), sécurisé(e).
Votre ego demeure déficient et votre perception de vous-même et du monde est altérée. Par conséquent, vous avez du mal à poser des limites, et vos besoins légitimes passent au second plan. C’est pourquoi vous remettez votre pouvoir à votre partenaire narcissique, lui confiant, inconsciemment, la responsabilité de réguler vos émotions et votre équilibre intérieur. En psychologie, cette prédisposition est appelée locus de contrôle externe.
Cinquième phase : le maternage mutuel
Le fantasme partagé de votre narcissique repose sur un paracosme. En psychologie de l’enfance, un paracosme est un monde imaginaire régi par ses propres normes, peuplé d’amis imaginaires, doté de son propre dieu, de ses archétypes féminins, de son langage et de son histoire. L’enfant s’y réfugie pour échapper à l’abus dont il est victime et l’utilise comme un pont vers la réalité. Ainsi, son « Dieu protecteur » devient son « faux self ».
Devenu adulte, il structure structure son fantasme partagé autour de ce paracosme, dans lequel réside une sainte Famille. Il agit de façon inconsciente : il ignore qu’il est resté figé dans l’enfance, et que son psychisme demeure entièrement infantile.
Le Professeur Sam Vaknin développe ce sujet :
« Le narcissisme n’est pas seulement un trouble de la personnalité. C’est une perturbation profonde du processus de formation de l’identité. C’est une interruption d’un processus primordial d’évolution vers l’autonomie, dont le noyau est à la fois divin et animal.
Pour répondre à cette interruption provoquée par le traumatisme émotionnel et la faille, l’enfant crée une religion personnelle. Une fois adulte, il partage cette religion avec vous et vous y assigne un rôle.
Il construit une véritable Trinité, dans laquelle Dieu le Père est son faux self, vous êtes l’archétype de la Sainte Mère, et lui-même est « votre enfant ».
Il peut éventuellement assumer un rôle paternel sur le plan matériel…
Mais vous, en tant que mère, devez impérativement incarner l’amour inconditionnel, le soutien et l’acceptation totale, afin de l’aider à surmonter ses crises et ses défis personnels… »
Dans cette phase, vous incarnez donc la mère parfaite selon ses fantasmes infantiles. Ses automatismes d’observation, de scan et d’évaluation continuent d’évoluer. Il vous compare en permanence à l’objet interne idéalisé qu’il a fabriqué dans son esprit à partir de votre image.
Implicitement, il vous soumet à une évaluation continue pour vérifier si vous correspondez à l’image de la mère idéale — ou de la Sainte Mère — qu’il projette sur vous.
C’est alors qu’il vous assigne quatre rôles fusionnels et fonctionnels :
La mère nourricière : protectrice, rassurante et dévouée, prodiguant soins et réconfort sans jamais rien exiger en retour.
La servante ou l’esclave : constamment disponible, soumise à ses moindres désirs, exploitée sans le moindre scrupule.
La poupée sexuelle : objet de désir façonné selon ses fantasmes, privée de toute volonté propre.
La source d’approvisionnement narcissique : par vos attentions, vos regards, votre admiration — ou, plus souvent encore, par votre souffrance.
Le narcissique pathologique rejoue le conflit avec sa mère
L’enfant qui deviendra narcissique pathologique a vécu une expérience traumatique et odieuse auprès de sa mère. Alors, une question s’impose : pourquoi chercher à revivre ce cauchemar ?
Le Professeur Sam Vaknin éclaire ce paradoxe :
L’enfant devenu narcissique n’a jamais pu se séparer psycho-émotionnellement de sa mère, ni s’individualiser, car celle-ci était morte dans ce rôle.
Le psychanalyste français André Green a créé la notion de « mère morte » pour décrire un type de mère psycho-émotionnellement absente, qui confond son enfant avec le rôle inconscient qu’elle lui attribue dans son propre psychisme, en faisant de lui tantôt un objet idéalisé et protecteur, tantôt un objet persécuteur, voire son compagnon de substitution.
Le transfert de sa mère morte sur vous
Le transfert est un mécanisme psychique par lequel nous déplaçons sur une personne actuelle — partenaire intime, enfant, ami ou thérapeute — des émotions et des ressentis initialement vécus avec une personne significative de notre enfance, comme notre mère ou notre père.
Le narcissique pathologique réalise le transfert de sa « mère morte » sur vous.
Ce phénomène est illustré dans le film Psychose d’Alfred Hitchcock, où Norman Bates, profondément marqué par une relation toxique et étouffante avec sa mère, conserve après sa mort son corps momifié dans la maison, refusant de la laisser partir réellement. Chaque matin, il prend soin d’elle : il la sort du lit, l’habille, puis l’installe devant la fenêtre.
Ayant tué sa mère des années auparavant, Norman assume sa personnalité et sa voix comme si elle était toujours vivante. Il finit par tuer une femme qui le fascine. Ce comportement traduit une fixation extrême, une incapacité à accepter la séparation d’avec la mère et à construire une identité autonome.
Ce film illustre parfaitement le transfert que votre narcissique effectue de sa mère sur vous, vous faisant disparaître en tant qu’individu autonome. Étant uniquement perçu(e) comme sa mère, il cherche à vous détruire et à vous momifier psychologiquement, à faire de vous son zombi contrôlable à volonté.
Vous devenez sa « nouvelle mère »
Le narcissique n’interagit jamais avec vous, mais avec la représentation qu’il fait de vous.
Lorsque vous entrez dans sa vie, vous devenez pour lui sa nouvelle mère réparatrice.
À travers vous, il rejoue tout ce qu’il n’a jamais pu exprimer ni digérer de son enfance, notamment dans sa relation complexe et conflictuelle avec sa mère. Inconsciemment, il
espère parvenir enfin à cette séparation d’avec elle, qui l’a empêché de grandir.
En réglant, avec vous, les comptes restés ouverts, il s’imagine pouvoir évoluer, se réaliser et, enfin, s’épanouir. Cette stratégie est le fruit d’une adaptation à l’adversité — très dysfonctionnelle mais ingénieuse. Elle lui permet de manipuler ses partenaires pour satisfaire ses besoins infantiles inassouvis.
Pour vous aspirer dans son fantasme partagé, il commence à afficher des comportements infantiles. Il se comporte de plus en plus comme un enfant blessé. Il peut se sucer le pouce, il peut parler comme un bébé. Certainement, il vous envoie deux messages implicites :
Je ne suis qu’un enfant inoffensif, ne me fais pas de mal.
Je suis sans défense, prends soin de moi, aime-moi, ne m’abandonne pas…
Beaucoup de femmes refusent de se prêter à ce jeu. Donc le narcissique les repousse. Il éprouve du ressentiment et rejette les femmes qui refusent d’assumer le rôle de mère.
Il a peur des femmes épanouies, indépendantes, autonomes, sexuelles et féminines. Et lorsque ces femmes refusent ce rôle, ou lorsqu’elles deviennent mères pour un moment et puis se retirent, il explose littéralement ! Il maltraite verbalement ces femmes et leur envoie des messages abusifs.
C’est vous qui décidez donc d’entrer, ou non, dans son fantasme partagé. Si vous êtes empathique, ses messages attendrissants touchent votre instinct maternel ou protecteur.
Vous commencez alors à prendre soin de ce « bébé » en détresse et à l’infantiliser devenant ainsi la mère substitutive de sa mère originelle.
Mais ce faisant, vous nourrissez son faux self. Vous lui offrez un amour fusionnel et une relation symbiotique qui le maintiendra figé dans l’infantilisme.
Par conséquent, vous n’aurez jamais, avec lui, un vrai homme — seulement un invalide émotionnel. Pas de repas substantiel, délicieux et complet : uniquement de la malbouffe, qui finira par vous intoxiquer.
Vous n’avez droit qu’à l’illusion d’aimer un homme
En raison de votre acceptation de son handicap émotionnel — et surtout de votre idéalisation — le narcissique devient, pour un certain temps ce qui ressemble à un homme.
Il sait à quel point il est défectueux, déficient, handicapé et difforme.
C’est pourquoi, durant les phases d’idéalisation et de maternage, il agit comme s’il était un homme : il vous courtise, a des relations sexuelles avec vous, partage des activités ludiques, mais tout de manière rudimentaire.
Cependant, ce scénario n’est qu’une autoduperie : pendant un temps, vous croyez tous les deux qu’il est un homme, un peu enfantin, certes, mais pleinement adulte — ce qui est un mensonge. Une fois que vous devenez accro à son spectacle technicolor, le narcissique tombe le masque — et cesse d’être un homme. Tout cela n’était qu’une comédie, du théâtre, un fantasme, un mirage — avant que le vrai narcissisme n’émerge.
Finalement, il vous pousse à endosser le rôle de sa mère, car seule une figure maternelle peut lui procurer un sentiment de sécurité. Il devient alors asexué ou incapable de maintenir une érection, car vous êtes désormais confondue avec l’image maternelle.
Il devient votre mère inconditionnelle
Pour un temps, il joue le rôle de la mère inconditionnelle : il vous couvre d’attentions et d’un amour apparent, tout en modulant ses réactions en fonction de vos réponses émotionnelles, car même s’il est incapable de reconnaître votre altérité, il perçoit parfaitement vos vulnérabilités grâce à son empathie froide, strictement cognitive.
Dans cet échange symbiotique, vous régressez à votre tour. Vous vous sentez comme un petit bébé enfin pleinement accepté et sécurisé. Vous expérimentez ce qui ressemble à de l’amour maternel — peut-être pour la première fois. Cependant, ce n’est qu’un fantasme. Car le regard d’un narcissique pathologique ne se pose pas sur vous, mais sur l’objet idéalisé qu’il a fabriqué à partir de votre image.
Non conscient(e) de ce fait, vous commencez à vous aimer à travers ce regard — un regard que vous percevez, à tort, comme « maternel ». Vous avez l’impression que votre partenaire intime vous offre une seconde chance d’être aimé(e), entièrement, inconditionnellement. C’est ainsi que s’installe le maternage mutuel, où chacun régresse au stade infantile, celui du narcissisme primaire.
Pourtant, paradoxalement, le narcissique finit par rejeter votre amour et le maternage mutuel. Ayant associé, depuis l’enfance, amour et abus, il ne supporte pas longtemps l’expérience de cet amour fusionnel et de cette relation symbiotique qu’il réclame autant qu’il redoute. Il a donc peur de l’intimité.
Dès lors, par des maltraitances successives, il vous pousse progressivement à réagir, à résister, à l’agresser. Lorsque vous commencez à poser des limites, il s’autorise alors à vous rejeter avec une grande cruauté, révélant son sadisme latent et son absence d’empathie.
Votre équilibre interne dépend de votre narcissique
Pendant cette phase de maternage mutuel, votre équilibre intérieur devient entièrement conditionné par la présence du narcissique, car vous vivez déjà sous son emprise.
Vous ne percevez pas qu’il vous entraîne dans ses fantasmes et ses fabulations, et qu’il provoque chez vous une régression infantile — d’autant plus marquée si vous êtes déjà en proie à une dépendance affective et au doute de vous-même.
Sous l’effet de cette régression, vous lui accordez inconsciemment le rôle de guide, de maître spirituel, voire de bourreau sacrificiel, prêt(e) à offrir votre cœur à son faux self.
Vous vous abandonnez à lui, lui donnant tout ce qu’il demande — qu’il l’exprime ouvertement ou qu’il le suggère subtilement par des injonctions implicites.
Progressivement, vous assumez l’ensemble des rôles qu’il vous a attribués :
La mère nourricière qui veille sur lui.
La servante dévouée qui anticipe ses besoins.
La poupée sexuelle qui satisfait ses désirs.
La source de provision narcissique, dont il se nourrit par votre admiration, votre dévotion ou votre souffrance.
Vous vous investissez corps et âme pour maintenir l’illusion d’une solidarité fusionnelle, d’une complicité affective, d’une intimité profonde — alors même que, en réalité, il évolue dans une logique inverse : l’exploitation et l’absorption de votre énergie vitale.
Par ce don de vous-même sans limites, vous devenez sa principale ressource : affective, psychologique, mais aussi matérielle et financière.
Ainsi, il vous amène insidieusement à :
Mettre votre logement à sa disposition s’il n’en possède pas ;
Prendre en charge ses dépenses courantes ou ses dettes accumulées, sans le moindre état d’âme de sa part ;
Former avec lui une sorte de partenariat où c’est vous qui travaillez pour lui ;
Financer ses loisirs, ses vêtements, ses divertissements et vos voyages communs ;
Lui offrir des cadeaux luxueux — parfois jusqu’à acquérir pour lui des biens somptuaires, comme un bateau ou ses équipements ;
Ou bien, à l’inverse, vous devenez financièrement dépendant(e) de lui, mais vous assumez l’ensemble des tâches domestiques : courses, repas, ménage, gestion quotidienne.
Dans les deux cas, vous êtes happé(e) dans une spirale où le narcissique pathologique se nourrit de votre dévotion, tout en entretenant l’illusion d’un lien fusionnel devenu indispensable à votre propre équilibre psychique.
Les tests délirants du narcissique
Dans toute relation intime, il est naturel que les partenaires se soumettent ponctuellement à de petits tests psycho émotionnels. Chacun porte en lui son altérité, sa structure psychique, ses insécurités, ses blessures. Mais chez le narcissique pathologique, ces tests prennent une dimension toxique, délirante et continue.
Dès qu’il perçoit — ou imagine — que vous pourriez être une mère nourricière pour lui, inconsciemment il cherche à vérifier son hypothèse. Il se demande :
« M’acceptera-t-elle et m’aimera-t-elle inconditionnellement quoi que je fasse ? »
« Son amour pour moi est-il véritablement constant et fiable ? »
« Ou bien s’agit-il d’une simple transaction, qui réclamerait de ma part des efforts et des échanges réciproques ? »
Pour répondre à ces questions, il vous met à l’épreuve à travers des abus narcissiques destinés à tester votre amour inconditionnel, votre fiabilité et votre persévérance — la permanence de l’objet que vous êtes pour lui.
Ces abus sont agressifs, car son affectivité est négative. Ils visent à mesurer jusqu’où il peut vous pousser avant que vous ne cédiez. C’est un jeu de pouvoir très destructeur. Il s’arroge le droit de vous modeler selon ses propres besoins, en exerçant sur vous un contrôle permanent, ainsi que diverses formes de manipulation et d’agression.
Voici quelques exemples concrets de ses abus :
Négligence et abus psychologiques :
Il vous ignore, use de mépris, de harcèlement, de moqueries, d’humiliations et de brimades. Parfois, il exerce une coercition sourde, cherchant à vous contrôler et à vous affaiblir psychiquement.
Comportements paranoïaques :
On observe des épisodes de jalousie, une surveillance intrusive de vos communications personnelles, des interrogatoires récurrents visant à contrôler vos gestes, ce que vous faites hors de la maison, ainsi que des manifestations d’agressivité verbale ou non verbale.
Genèse de la peur :
Cela peut prendre la forme de cris menaçants, de stratégies de manipulation machiavélique, de chantage émotionnel, de menaces accompagnées de jets d’objets, de coups portés contre les murs ou les portes. Mise en danger par une conduite imprudente marquée par des accélérations brutales pour exercer une pression, ou par la présence d’armes dissimulées dans un placard de la maison.
La manipulation et le contrôle du narcissique classique :
Il vous manipule et vous contrôle par un langage destiné à vous dominer, à vous humilier, à vous intimider ou à vous harceler. Il exprime sa colère de manière ouverte, dans le but de générer votre crainte ou de vous faire sentir coupable. Son abus narcissique est manifeste, bruyant et violent. Son agression est frontale et directe. Il peut vous agresser physiquement. Lisez cet article en cliquant sur le titre : Les narcissiques classiques.
La manipulation et le contrôle du narcissique caché passif-agressif :
Son contrôle est furtif, subtil et nuancé. Pour vous manipuler, il emploie des messages chargés de doubles sens et de venin. Il crée des expressions sémantiques dans lesquelles certains mots revêtent des significations cachées. Il vous contrôle par la frustration constante, l’opposition systématique, le désintérêt sexuel, le silence glacial et l’interdiction implicite de vous exprimer. Son agression passive est feutrée, presque imperceptible. Elle s’exprime par le refus de communiquer, par des remarques blessantes ou des critiques humiliantes. Lisez cet article : Les narcissiques cachés.
Justification de ses abus :
Qu’il soit manifeste ou caché — ou parfois l’un, puis l’autre — le narcissique se positionne en victime de vos protestations, de votre colère et de vos prétendues offenses, ainsi que de votre souffrance, se donnant ainsi le droit de vous maltraiter encore davantage.
Attaques personnelles et insultes psychiatriques :
Il peut aller jusqu’à évoquer des troubles mentaux pour vous déstabiliser :
« Tu es folle (ou fou). »
« Va te faire soigner, je ne suis pas ton infirmier psychiatrique. »
« Tes larmes me tombent dessus comme la pluie sur les plumes d’un canard. »
Invalidation de vos émotions :
Il minimise vos ressentis, invalide vos émotions et votre colère légitime, et vous pousse à douter de la gravité de ce que vous subissez.
Refus de reconnaître ses torts :
Lorsque vous tentez de lui faire remarquer ses comportements, il retourne systématiquement la situation contre vous et utilise le blâme pour vous accuser à sa place.
Utilisation de vos confidences contre vous :
Les confidences intimes que vous lui avez livrées deviennent des armes pour vous critiquer, vous blesser ou vous discréditer.
Abus sexuels :
Ceux-ci allant de pratiques sexuelles imposées, dégradantes ou teintées de sadisme, jusqu’au viol conjugal continuel. À l’opposé, il peut également s’exprimer par une asexualité imposée, utilisée comme moyen de contrôle, de punition ou de déstabilisation psychique.
Ces abus sont modérés au départ, mais dans les phases ultérieures ils vont s’intensifier.
Vous devenez son otage
Non seulement le narcissique ne vous exprime aucune gratitude pour votre amour, vos efforts et vos sacrifices, mais il finit par faire de vous un véritable otage psychologique.
Il vous isole progressivement :
• Il prétend prendre soin de vous, mais vous éloigne de votre famille et de vos amis ;
• Il ne vous encourage jamais à créer ni à entretenir des liens sociaux extérieurs, surtout si lui-même en est dépourvu, parce qu’il a peur des autres ou parce qu’il les méprise.
• Il ignore systématiquement vos ressentis et vos besoins affectifs.
Pour lui, vous n’existez plus en tant que sujet. Vous devenez invisible, presque inexistant(e), réduit(e) à l’état d’objet utilitaire. C’est ainsi qu’il contrôle la relation et continue de se nourrir de vous comme une source d’approvisionnement narcissique.
Par ce type de traitement, il laboure votre esprit comme on laboure la terre. En vous privant de vos besoins légitimes, il vous infantilise progressivement, jusqu’à entraîner une perte de vos fonctions de l’ego, essentielles pour bien fonctionner dans le monde. Quant à lui, il alimente son illusion d’omnipotence, d’omniscience et de supériorité.
Pourquoi le narcissique reste-t-il prisonnier de cette dynamique interne ?
Tous les survivants d’un abus narcissique vous diront que leur narcissique pathologique a été incapable de les aimer. Et ils ont raison.
En réalité, le narcissique est souvent entouré de personnes qui souhaitent lui offrir de l’amour, de la compassion, de l’affection, de l’empathie, du soutien, des conseils et de l’aide.
Et pourtant, il n’est jamais vraiment présent pour elles.
Il est incapable de recevoir ces dons. Il les méprise, les rejette et les repousse en devenant agressif, humiliant, blessant et destructeur.
Le narcissique ne peut pas aimer. Mais il ne se laisse pas non plus aimer. Il ne peut pas être aimé. La raison profonde réside dans son noyau psychique : il se perçoit comme un mauvais objet.
Ce « mauvais objet » est un amalgame de voix internes, d’introjections critiques, qui lui répètent sans cesse à quel point il est mauvais, inacceptable, et surtout indigne d’amour.
Ces voix lui disent qu’il est un échec, qu’il est nul, laid, stupide, incapable, etc. Et comme il croit tout ce que lui dit son mental, il développe un profond complexe d’infériorité.
Pour compenser ce mauvais objet — cette cacophonie intérieure dégradante, humiliante, honteuse — le narcissique invente un faux moi : un faux self.
Pourquoi ? Parce que dans la matrice traumatique de son enfance, le narcissique a lui-même été victime de dévalorisation et de rejet. Sa propre mère ne lui offrait ni amour constant, ni fiabilité émotionnelle, ni affection inconditionnelle. Au contraire, elle l’instrumentalisait, ne partageant avec lui que des transactions affectives, souvent empreintes d’abus. Ou bien, l’amour qu’il réservait n’était qu’une transaction pour combler le vide affectif de sa mère.
Aujourd’hui, la dynamique s’inverse : ayant désormais le pouvoir, le narcissique reproduit sur vous ce qu’il a lui-même subi, car vous incarnez symboliquement sa mère de substitution.
À travers vous, il poursuit sa lutte intérieure contre cette mère primitive. Il vous interdit de vous séparer de lui, tout comme sa mère lui interdisait jadis de se détacher d’elle.
En même temps, il vous dévalorise et vous rejette, exactement comme il a lui-même été humilié et rejeté lorsque, enfant, il avait besoin d’amour et de soutien pour s’individualiser et se séparer de sa mère, afin d’évoluer vers son autonomie et sa souveraineté.
Ainsi, il vous dévalorise et vous rejette pour mieux parvenir, inconsciemment, à cette séparation impossible avec sa mère d’origine. Ce que vous devez comprendre avant tout, affirme Sam Vaknin, c’est que ses maltraitances ne sont pas de votre faute.
Vous n’avez rien fait de mal. Ses comportements ne parlent que de lui, et non de vous.
Ce que vous devez comprendre avant tout, c’est que ses maltraitances ne sont pas de votre faute. Vous n’avez rien fait de mal. Ses comportements ne parlent que de lui, et non de vous.
Votre participation à son fantasme partagé
En dépit du fait que ce soit le narcissique pathologique qui contrôle la dynamique du couple, le fait demeure : vous vivez dans un état de régression infantile, et cela mérite d’être reconnu.
Sous l’effet hypnotique de cette régression, vous restez inconsciemment figé(e) dans la phase d’idéalisation et de maternage mutuel. Vous vous sentez accepté(e), aimé(e), valorisé(e). Cet état de fusion vous apaise, vous sécurise. Il devient, en quelque sorte, votre pilule anxiolytique émotionnelle.
C’est pourquoi il vous est presque impossible de croire à son changement soudain, à cette métamorphose brutale, insupportable, incompréhensible — surtout si vous souffrez déjà de dépendance affective. Alors, vous continuez à rêver…
De plus, vous endossez le rôle de mère salvatrice et nourricière, maintenant le narcissique dans un état d’infantilisation. Ce rôle vous valorise ; il donne un sens à votre vie. Pourtant, cette posture repose sur une incohérence que vous devez surmonter : vous vous sacrifiez pour votre « bébé » narcissique.
Vous faites de concessions sacrificielles
Lorsque vous vous suradaptez et vous sacrifiez pour une personne narcissique, vous évitez en réalité les compromis véritables — ces ajustements réciproques indispensables à toute vie de couple, fondés sur le respect des limites de chacun.
À force de vouloir lui plaire et de vous plier à ses exigences, vous finissez par vous nier, vous rejeter, vous oublier… Ce n’est pas par amour sincère que vous vous sacrifiez, mais par peur : peur de sa colère, de ses jugements, de l’abandon, du rejet, ou pire encore, peur de son indifférence glaciale — cette absence psycho-émotionnelle quotidienne.
Vous mobilisez la mentalisation : vous tentez de deviner ce qui se passe dans son esprit, tout en évitant de donner votre avis, de montrer vos sentiments, jusqu’à vous réduire à la soumission totale. Vous renoncez ainsi à vos propres valeurs et à votre jugement intérieur.
Ces comportements traduisent ce que la psychologie appelle un modèle de fonctionnement intérieur anxiogène — une théorie héritée, souvent d’un parent, qui dicte comment les relations « devraient » être.
Hypnotisé(e) par cette croyance, vous perdez la capacité de voir la réalité telle qu’elle est. Vous vous défendez alors par l’autodénigrement et la dévalorisation, rendant impossible toute construction d’une relation équilibrée.
Dans ce contexte, il est vital de vous interroger chaque jour :
« Quelles concessions suis-je en train de faire ? »
« Qu’est-ce que je ne reçois pas dans cette relation ? »
Prenez le temps d’y répondre honnêtement. Notez toutes vos concessions, et tout ce qui vous manque. Appuyez-vous sur l’ARA : Amour, Respect et Attentions.
« Reçois-je de l’amour, du respect, des attentions ? »
« Respecte-t-il mon altérité et mes besoins légitimes ? »
Enfin, posez-vous cette question essentielle :
« Quel est le pire qui pourrait arriver si je ne me conforme plus, si j’arrête de faire des concessions, si je cesse de me nier ? »
Faites chaque jour une liste exhaustive de vos réponses, puis, pour chacune, demandez-vous :
« Est-ce vraiment vrai ? »
Votre dépendance affective et votre trauma complexe
La dépendance affective et le trauma complexe sont intimement liés. Comme les narcissiques, vous avez sans doute traversé des traumatismes émotionnels durant l’enfance, entraînant une dévalorisation de soi, une faible estime personnelle, et un profond manque de confiance en vous.
Pourtant, vous vous efforcez de sauver la relation par votre amour, votre dévotion, votre capacité à donner, et même à vous sacrifier. Mais vous êtes incapable de poser des limites saines et de respecter vos besoins légitimes — notamment celui d’évoluer vers votre autonomie — ce qui revient, paradoxalement, à infantiliser le narcissique.
Par peur de l’abandon, par besoin de fusion, vous vous suradaptez à ses abus. Vous le laissez prendre le contrôle, dominer la relation et vous culpabiliser. Il est essentiel d’entreprendre un travail intérieur pour vous libérer de votre dépendance affective.
Lisez l’article sur le sujet en cliquant ici : S’affranchir de la dépendance affective.
L’un de vos parents était-il narcissique pathologique ?
Si, enfant, vous avez grandi sous l’emprise d’un parent narcissique, vous avez introjecté son image et son identité d’absence — son absence émotionnelle.
Vous avez intégré son paracosme — un univers de fantasmes inconscients, totalement déconnectés de la réalité.
Vous avez incorporé sa rage narcissique et ses messages toxiques — ses jugements, ses insultes, ses maltraitances.
Vous avez intériorisé la destruction de votre psychisme — son instrumentalisation, le rôle d’extension identitaire qu’il vous a imposé, voire son inceste psychologique.
Hypnotisé(e) par ces introjections, et par les voix de ce parent dans votre esprit, vous avez développé une propension à vous nier, à vous maltraiter psychologiquement, voire à vous détruire, comme ce parent le faisait. Psychiquement, vous êtes resté(e) cet enfant attaché à cet objet interne à la fois persécuteur et idéalisé.
Vous devenez l’extension identitaire du narcissique pathologique
Qu’il soit manifeste ou caché, le narcissique pathologique fait de vous le prolongement de lui-même. Par conséquent, vous régressez à l’époque où vous étiez maltraité(e) et instrumentalisé(e) par un parent narcissique ou dysfonctionnel.
Ainsi, vous perdez votre sens de l’altérité, votre individualité s’efface, et vous devenez son extension psycho-émotionnelle.
C’est là que se situe le terrain commun entre vous et le narcissique : vous partagez une enfance marquée par des relations dysfonctionnelles et traumatisantes. Comme le narcissisme pathologique, la dépendance affective est une condition post-traumatique. Elle est le résultat de l'interruption brutale du développement de l’autonomie psychoaffective et émotionnelle de l’enfant. Vous vivez ainsi dans un état chronique de régression infantile.
Aujourd’hui, vous rejouez ce même scénario dans votre relation avec votre partenaire narcissique :
En état de régression infantile, vous introjectez son image en tant qu’objet idéalisé.
Plus tard, vous incorporez ses messages dévalorisants et dénigrants.
Vous intériorisez son programme de destruction psychique.
Alors, vous doutez de vous-même et invalidez vos émotions : « Je suis confus(e). » — « Je perds la tête. » — « Je n’aurais pas dû exprimer mes émotions. » — « J’aurais dû me taire. »
Finalement, vous vous autodétruisez.
Vos enfants seront les témoins de votre suradaptation et soumission, de votre détresse, de votre autodestruction, et peut-être qu’ils incorporeront vos comportements.
Les différences entre narcissisme pathologique et dépendance affective
Malgré des mécanismes défensifs infantiles similaires, le narcissisme pathologique et la dépendance affective présentent des dynamiques profondément différentes.
Voici les trois distinctions principales :
Le dépendant affectif devient hyperempathique, tandis que le narcissique devient hyperégoïste et totalement insensible.
Le narcissique pathologique est affamé d’existence, tandis que le dépendant affectif est affamé d’amour. Ce sont deux faims opposées.
C’est pourquoi, le dépendant affectif cherche à préserver la relation, alors que le narcissique œuvre inconsciemment à s’en séparer.
Le narcissique adopte des défenses alloplastiques : il blâme l’autre pour sa souffrance. Le dépendant affectif, lui, fonctionne par défenses autoplastiques : il se rend responsable, se blâme et s’accuse.
Comment fonctionnent vos défenses autoplastiques ?
Enfant, vous avez développé des défenses adaptatives dites autoplastiques, afin de survivre au sein d’une famille dysfonctionnelle. Sous l’influence d’un parent narcissique, par exemple, vous avez appris à vous sentir coupable et honteux(se) face à ses agressions.
Aujourd’hui, si votre partenaire intime est un narcissique pathologique, vous vous sentez coupable — voire honteux(se) — de sa colère, de ses abus, de chaque conflit.
Ne pas reconnaître que cette culpabilité est l’héritage émotionnel de votre enfance vous empêche de respecter vos besoins fondamentaux et vos limites psychoaffectives.
Et même lorsque vous parvenez à poser quelques limites, le narcissique les viole invariablement.
La seule issue possible est de vous retirer de cette relation. Autrement, vous risquez de devenir une victime résignée, enfermée dans un système d’abus, auquel vous vous suradaptez.
Pourquoi vous sentez-vous coupable si vous êtes victimisé(e) ?
Remarquez que lorsque vous ressentez de la culpabilité, vous vous dites implicitement : « Je suis responsable des traitements qu’il m’inflige. »
Or, il n’y a pas de raison de ressentir de la culpabilité si vous n’avez rien fait de répréhensible — si vous n’avez pas menti, ni caché d’information, ni agi de façon malhonnête.
Peut-être que la seule chose dont vous pourriez réellement vous sentir coupable, c’est d’avoir fait le choix initial de commencer une relation avec cette personne.
Cependant, une fois confronté(e) aux manipulations d’un(e) narcissique pathologique — à son contrôle, à ses comportements, à l’hypnose relationnelle qu’il exerce sur vous — vous croyez encore avoir le pouvoir de faire des choix, alors qu’il vous hypnotise par ses injonctions, ses demandes, et tout ce qu’il attend de vous.
Lorsqu’il est mécontent, irrité, frustré ou en colère, et qu’il vous punit, vous néglige ou vous maltraite, vous vous sentez coupable parce que vous croyez avoir commis des erreurs, fait de mauvais choix.
Dans cette situation, vos défenses autoplastiques vous induisent en erreur : elles vous donnent l’illusion que vous pouvez contrôler les situations au sein de cette relation toxique. Mais en réalité, une fois entré(e) dans la dynamique pathologique d’un(e) narcissique, vous êtes prisonnier(ère) de son fantasme partagé. Vous ne pouvez pas descendre de sa montagne russe en mouvement.
Votre culpabilité vous amène à croire que vous avez une forme de contrôle au sein de cette dynamique infernale, ce qui vous apaise psychiquement. Le sentiment de contrôle agit comme un anxiolytique émotionnel. Mais la vérité, c’est que vous n’êtes pas en contrôle de ses actes.
La culpabilité est le prix que vous payez pour ressentir que vous avez un semblant de contrôle. Pourtant, dès la première phase de la relation, ce contrôle n’existe plus, sauf si vous faites le choix radical de partir. Lisez cet article en cliquant sur le titre : Quitter un narcissique pathologique.
En résumé, la culpabilité est un sentiment lié au pouvoir de choisir :
On ressent de la culpabilité lorsqu’on a eu le pouvoir de faire un autre choix.
Si vous avez eu la liberté d’agir, de dire non, de fixer des limites, alors vous pouvez vous sentir coupable lorsque les choses tournent mal.
Mais si vous étiez hypnotisé(e), dissocié(e), déréalisé(e), dépersonnalisé(e), impuissant(e), contrôlé(e), ou privé(e) d’une réelle liberté par la contrainte, vous ne pouviez pas être responsable de vos actes.
Seules les personnes libres de leurs choix peuvent éprouver de la culpabilité lorsqu’elles se trompent.
Voyons maintenant comment fonctionnent les défenses alloplastiques du narcissique.
Les défenses alloplastiques des narcissiques pathologiques
Les narcissiques ne ressentent ni culpabilité, ni remords, ni regret — précisément parce qu’ils se perçoivent, de manière paradoxale, comme impuissants.
Comme tout narcissique, le vôtre a tendance à blâmer les autres, tout ce qui l’entoure — les gens, les institutions, l’histoire, la nation, le collectif, le travail, le patron, le conjoint, les enfants, l’Église... Il blâme les autres pour ses propres choix, décisions, défis, fiascos et défaites. Les autres portent toujours la faute ; lui, jamais la responsabilité.
Mais quand un narcissique nie sa responsabilité personnelle, il nie aussi son propre pouvoir. Cela signifie qu’il se laisse contrôler de l’extérieur, que sa destinée est déterminée par les autres. C’est cela, un locus de contrôle externe. Il rejette la faute sur autrui, car inconsciemment il adhère à l’idée que sa vie ne lui appartient pas, qu’elle est entre les mains de forces supérieures, de structures ou d’institutions.
Ainsi, dans la relation de couple, il rejettera systématiquement la faute sur vous, parce qu’il a fait de vous le/la dépositaire de son équilibre intérieur — vous êtes son locus externe de contrôle. Il vous blâmera donc pour ses réactions, ses colères, ses frustrations et même ses comportements maltraitants et ses abus.
En résumé :
Le narcissique ne ressent pas de culpabilité. Pourquoi ? Parce qu’il se perçoit — inconsciemment — comme impuissant, contrôlé par les autres ou par le monde.
Pour se défendre, il construit une fausse image de lui-même : parfaite, toute-puissante, sans faille. C’est ce qu’on appelle le faux self.
Cette image a pour fonction de masquer un profond sentiment de honte, ainsi que sa culpabilité.
Voyons sa réaction face à votre infidélité…
Que se passe-t-il si vous êtes une dépendante affective « active » ?
À un certain stade, vous ressentez un besoin de rupture, pour tenter de restaurer votre dignité et votre équilibre intérieur. Vous en venez à envisager la trahison — non par vengeance, mais comme une ultime tentative de récupérer votre estime de vous-même.
L’infidélité devient alors un acte symbolique : une manière de reprendre du pouvoir sur vous-même, de réaffirmer votre humanité, votre féminité ou votre masculinité, de vous libérer des miasmes toxiques de cette relation.
Même si vous n’agissez pas concrètement, l’idée elle-même vous traverse l’esprit. En réalité, le narcissique vous pousse à le trahir, car vous incarnez sa mère — celle qu’il cherche désespérément à quitter.
Par son absence émotionnelle, son autoérotisme ou ses abus constants, il vous pousse à bout. C’est ainsi que naît ce que l’on appelle une trahison collusoire.
Par exemple, le narcissique cérébral vous accable par son indifférence sexuelle. Il teste votre seuil de rupture. Et lorsque vous finissez par le tromper — ou simplement par y songer —, il se nourrit de votre « échec ». Il s’en nourrit pour se sentir omniscient, supérieur moralement, prétendant rester fidèle tandis que vous, selon lui, avez fauté.
Tous les comportements des narcissiques et des dépendants affectifs reposent sur une déficience des fonctions essentielles de l’ego.
Le manque d’un ego fonctionnel
Comme les narcissiques, les dépendants affectifs souffrent d’un déficit des fonctions cruciales de l’ego. C’est pourquoi ils vivent dans un état chronique de régression infantile et cherchent à fusionner avec l’autre, rêvant de ne faire qu’un seul organisme à deux têtes.
Ils perçoivent leur partenaire intime comme une âme sœur destinée à combler leur vide intérieur. Certains, animés par une peur profonde de l’abandon, s’agrippent à la relation fusionnelle qui leur permet de maintenir un semblant de régulation émotionnelle.
En réalité, ils recherchent inconsciemment une figure maternelle nourricière, capable de réguler leurs émotions, les stabiliser et équilibrer leur dynamique interne.
Qu’est-ce que l’ego ?
L’ego est une instance psychique qui nous permet de discerner le vrai du faux, d’examiner la réalité et d’analyser les dynamiques psychiques que nous traversons.
Il nous aide à évaluer si la relation que nous vivons est saine ou destructrice.
Il régule nos émotions, tempère nos pulsions et nous donne accès aux fonctions cognitives et au jugement, entre autres fonctions. C’est lui qui permet de poser des limites saines et de construire des défenses psycho-émotionnelles équilibrées.
Sans un ego suffisamment structuré, il devient très difficile de comprendre ce qui nous arrive.
Pour approfondir ce sujet, cliquez sur ce titre : Les fonctions cruciales de l’ego.
En raison d’un ego déficient, il arrive que l’on nourrisse des croyances illusoires :
Imaginer que l’amour réside hors de nous, incarné par autrui, alors qu’il palpite au creux de notre propre cœur.
Prendre le scan du narcissique pour une marque d’intérêt, alors qu’il n’est qu’un prélude à l’enrôlement dans ses chimères et ses fabulations.
Négliger d’interroger les ressorts de son bombardement amoureux et prêter foi à ses fables, tandis qu’en sourdine, notre voix intérieure murmure l’étrangeté de la situation.
S’abandonner à la pensée magique, précisément au moment où il conviendrait de sonder le réel, de percevoir l’autre dans sa vérité, plutôt que de se bercer d’illusions.
S’enfermer dans un théâtre moral où l’empathie s’érige en vertu, alors que, face au narcissique, elle devient une arme retournée contre soi.
Se croire valorisé(e) par notre capacité à aimer, à conseiller, à donner, alors que les narcissiques méprisent tout ce qui leur est offert.
Se croire élu(e) pour notre singularité, alors qu’aux yeux du narcissique, nous ne sommes qu’un pourvoyeur interchangeable de ses quatre fantasmes : soins, sexe, services et approvisionnement narcissique.
Consentir à une transaction feutrée mais glaciale, où, à force de donner, nous ne sommes plus qu’un objet d’échange — une marchandise offerte sur l’autel d’un marché dévoyé.
Sixième phase : la dévalorisation de l’objet interne
La vie auprès d’un narcissique est profondément hypnotique. Dès les premières étapes de la relation, vous êtes happé(e) dans l’illusion d’un paradis.
Mais derrière cette félicité apparente se dissimule une tromperie radicale : depuis le début, il s’agit d’un abus total. En dépit des apparences, son besoin inconscient de se séparer de sa mère persiste. Il l’habite en permanence. Pour y parvenir, il devra tôt ou tard vous rejeter. À ses yeux, c’est la seule voie possible pour tenter d’échapper à son conflit archaïque non résolu. Mais tout cela reste inconscient.
La première étape du rejet : la dévalorisation de son objet interne
La dévalorisation s’amorce dès que le rôle de mère nourricière idéalisée que vous incarniez commence à vaciller dans son esprit. Il glisse alors vers une nouvelle perception de vous : celle de la « mauvaise mère ». À travers ce prisme déformé par ses fantasmes inconscients, le narcissique réactive le conflit archaïque qu’il n’a jamais pu résoudre avec sa figure maternelle. Il élabore alors un nouveau récit peuplé de fabulations, destiné à vous dévaluer.
Il faut savoir que, chez les narcissiques pathologiques, plus de 80 % de ce qu’ils pensent ou ressentent repose sur des fantasmes ou des fabulations qu’ils prennent pour la réalité.
Il est souvent difficile d’admettre qu’ils souffrent d’un véritable trouble de la personnalité, dont certaines manifestations peuvent de loin rappeler des traits de la schizophrénie. Contrairement à une idée répandue en France, il ne s’agit pas d’une perversion au sens clinique du terme. Le concept de « perversion narcissique » est une spécificité française, issue d’une lecture discutable. Nulle part ailleurs, on ne parle de pervers narcissiques dans le langage médical, psychiatrique ou psychologique.
Même si votre dépendance affective continue de brouiller votre perception, vous commencez néanmoins à entrevoir la réalité de cette personne à laquelle vous vous sentez intimement lié(e). Peu à peu, vous percevez son incapacité à aimer véritablement, son absence d’empathie affective, ainsi que son manque d’authenticité, de solidarité, d’intégrité, de sens de la justice et de responsabilité. Vous constatez que ses mécanismes de défense narcissiques se réactivent. Parmi eux, une stratégie redoutable refait surface : le renforcement intermittent.
Le renforcement intermittent : sa stratégie d’asservissement psychique
Dans cette sixième phase, le narcissique emploie une stratégie redoutablement efficace pour maintenir son emprise : le renforcement intermittent.
Inconsciemment, il alterne chaleur et froideur, attention et distance, affection et indifférence. Cette intermittence émotionnelle engendre en vous une confusion profonde, qui altère encore plus votre perception, renforçant ainsi son contrôle psychique.
Voici quelques exemples de ces oscillations destructrices :
Il vous idéalise, puis vous dévalorise sans avertissement.
Il vous comble de gestes tendres, tout en négligeant vos besoins fondamentaux.
Il fusionne dans une intimité intense, puis vous rejette soudainement dans un silence glacial — notamment s’il est narcissique caché.
Il vous flatte, puis glisse une remarque subtilement blessante, qui érode votre confiance.
Il affirme vous aimer, tout en sapant progressivement votre intégrité psychique.
Son cercle de punitions
Le narcissique vous enferme dans un cycle psycho-émotionnel vicieux, structuré comme suit :
Tension sourde — diffuse, difficile à nommer, mais omniprésente.
Agression passive ou manifeste — sarcasmes, jugements, critiques, mutisme, retrait affectif.
Geste d’apaisement — un mot tendre, un regard doux, une attention inattendue.
Reprise du cercle — et tout recommence.
Cette alternance vous plonge dans une attente permanente du retour de ces rares moments chaleureux que vous chérissez.
Elle vous pousse à tolérer de plus en plus ses accès de rage narcissique — qu’ils soient explosifs (narcissique classique) ou silencieux (narcissique caché).
Même dans la douleur, vous vous accrochez à l’espoir : ces éclairs de tendresse suffisent à raviver la croyance qu’un amour sincère est encore possible.
Mais pendant que vous espérez… vous dépérissez.
S’il est narcissique caché, le poison distillé agit de manière insidieuse, invisible et progressive — comme une intoxication émotionnelle à petites doses.
Comment réagissez-vous à cette intermittence ?
Prisonnier(ère) de votre état régressif, vous ne percevez plus que ce que votre psychisme ou votre dépendance affective vous autorisent à voir. Vous continuez à focaliser votre attention sur les points communs et les aspects superficiellement agréables de votre relation : vos voyages, les loisirs partagés, les goûts musicaux similaires ou vos passions communes pour la nature ou certaines activités.
Mais derrière ces convergences apparentes, vous refusez de voir ce qui se joue réellement. Vous ignorez les signaux d’alarme de sa pathologie car, à vos yeux, il est déjà votre « bébé » — celui que vous devez protéger. Vous lui trouvez sans cesse des excuses, parce que ce rôle de mère donne un sens à votre vie.
Hypnotisé(e) par ses fantasmes et ses fabulations, vous minimisez ses sautes d’humeur imprévisibles, ses abandons soudains en pleine dispute, son absence physico-émotionnelle, ses sarcasmes et ses remarques humiliantes.
En réalité, son affectivité est profondément négative : il cherche à absorber votre vitalité par sa frustration constante, et à contaminer votre joie par sa rage narcissique. Vous vivez dans l’illusion d’être aimé(e), mais le prix à payer est immense : renoncer à vous-même et à votre propre vie.
Vos défenses adaptatives autoplastiques se réactivent
Lorsque le narcissique se montre affectueux, charmant, drôle ou attentionné, vous oubliez momentanément les souffrances qu’il vous inflige. Cette alternance déstabilisante vous plonge dans un doute permanent de vous-même — surtout si vous souffrez de dépendance affective.
Sous l’effet de vos défenses autoplastiques — ces mécanismes adaptatifs forgés dans l’enfance — vous vous sentez automatiquement coupable et responsable de ses abus. Face à sa froideur ou à ses sautes d’humeur, vous cherchez instinctivement en vous la cause des conflits.
Vous vous dites :
« Si j’étais meilleur(e), il m’aimerait davantage. »
« C’est sûrement de ma faute s’il agit ainsi. »
Mais remarquez que c’est votre besoin de gérer et de contrôler la situation qui vous amène à penser ainsi. Ce fantasme de maîtrise vous donne l’illusion que, si vous changez, tout s’arrangera. En réalité, il vous éloigne de la vérité.
Tandis que le narcissique se protège par ses défenses alloplastiques, et rejette systématiquement la faute sur vous, et vous absorbez toute la responsabilité. Vous vous persuadez d’être fautif(ve), inadéquat(e), instable ou inadapté(e).
Vous devenez un « mauvais objet », non seulement à ses yeux, mais aussi aux vôtres.
Ainsi, votre confiance s’effondre, jusqu’à ce que vous finissiez par vous effacer ou vous soumettre entièrement, convaincu(e) que vos efforts sont toujours insuffisants.
L’engrenage inconscient du fantasme partagé
Pour cesser de vous auto-accuser, il est essentiel de comprendre la mécanique profonde du fantasme partagé. Dès le début, le narcissique ne vous choisit pas pour la personne que vous êtes, mais pour le rôle qu’il vous attribue dans son esprit — celui d’une mère parfaite. Il attend de vous un amour inconditionnel, constant et fiable, comme un enfant en besoin de sa mère.
Mais pour se séparer de cette mère archaïque et évoluer, il doit d’abord vous dévaloriser, vous rejeter encore et encore — dans l’espoir inconscient, mais illusoire, de devenir enfin autonome.
En vérité, il n’atteindra jamais cette autonomie tant qu’il restera identifié à l’« objet enfant » qu’il porte en lui — rempli de haine, de honte, d’amertume et d’auto-victimisation — et tant qu’il continuera à nourrir en son for intérieur l’objet interne « maman ».
Remarquez que vous et le narcissique êtes menés par ce fantasme inconscient — vous deux subissez inconsciemment le déroulement de ce drame inexorable.
Votre attachement à la phase d’idéalisation et de maternage réciproque
Pendant que le narcissique dévalorise l’objet interne qu’il a construit à partir de votre image, vous restez inconsciemment piégé(e) dans les premières phases de la relation : idéalisation, bombardement amoureux et maternage mutuel.
Vous continuez à croire que vous êtes pleinement accepté(e), aimé(e), reconnu(e).
Vous vivez dans un état prolongé de régression infantile, incapable de concevoir — ou d’accepter — ce changement brutal, incohérent, souvent incompréhensible, dans son comportement. Cette confusion s’accentue si vous souffrez déjà de dépendance affective.
Votre souffrance devient insupportable
Même si vous continuez d’espérer une amélioration, vous ressentez l’agonie d’être constamment nié(e), ignoré(e), ou dévalorisé(e).
Mais par peur de l’abandon, et sous l’effet de la puissance hypnotique du narcissique, vous persistez dans cette situation destructrice, qui démantèle lentement ce qu’il reste de votre intégrité psychique.
Identifié(e) à votre « personnage dépendant », vous rejouez sans fin les rôles qu’il vous impose : mère nourricière, souffre-douleur, domestique, esclave, victime soumise, objet exploitable — et parfois même, objet persécuteur.
Votre suradaptation à son abus devient alors proportionnelle à votre incapacité à poser des limites claires et à honorer vos propres besoins : amour, respect, reconnaissance, dignité.
Septième phase : la dévalorisation de l’objet externe
À ce stade avancé du fantasme partagé, le narcissique entre dans une dynamique de dévalorisation brutale de l’objet externe — c’est-à-dire de vous.
Après avoir introjecté votre image, vous avoir idéalisé(e) et incorporé(e) en tant qu’objet interne, il commence par dévaloriser cet objet.
Puis, il remet en question sa propre perception de vous — en tant qu’objet externe.
Il se persuade qu’il s’est trompé à votre sujet : que vous n’étiez pas aussi parfait(e), idéal(e) ou exceptionnel(le) qu’il le croyait. Il en vient à la conclusion qu’il vous a surestimé(e).
Son fonctionnement psychique reposant quasi exclusivement sur ses récits intérieurs et ses fabulations, il accorde une confiance absolue à cette nouvelle version de l’histoire.
Reconnaître qu’il s’est trompé reviendrait à admettre une faille narcissique insoutenable : qu’il n’est pas infaillible, qu’il n’est pas omniscient, qu’il n’est pas divin.
Une telle prise de conscience ébranlerait les fondations même de son faux self. Sa survie psychique repose donc sur le maintien de ses distorsions cognitives et de son délire de grandeur.
Pour surmonter cette angoisse d’imperfection, le narcissique active un mécanisme de défense classique : la projection. Il vous attaque — verbalement ou psychiquement — en vous prêtant ses propres failles : sa peur, sa honte, son vide, sa rage.
Vous devenez le réceptacle de ce qu’il refuse de reconnaître en lui-même.
L’identification projective : la projection de sa propre honte
Lorsqu’il vous idéalisait, il s’idéalisait lui-même à travers vous. Mais au moment de la dévalorisation de l’objet externe, il éprouve une haine insupportable envers lui-même, car au fond, il se considère comme un « mauvais objet ». Il se sent impuissant et honteux.
Plutôt que d’affronter cette dévalorisation intérieure, il en projette la charge émotionnelle sur vous. Vous devenez alors le dépositaire de ses insuffisances et de ses imperfections.
Vous incarnez désormais son image négative — ce mauvais objet auquel il s’identifie, mais qu’il est incapable de reconnaître consciemment, d’assumer ou de remettre en question.
Il aligne alors la dévalorisation de l’objet interne (l’image idéalisée qu’il avait construite de vous) et celle de l’objet externe (vous, dans votre réalité).
Par cette dévalorisation intégrant ces deux objets, il parvient à restaurer son image de perfection quasi divine.
Voici quelques-unes de ses rationalisations typiques :
« Je ne me suis pas trompé : c’est elle qui a changé. »
« Elle est manipulatrice, malveillante, elle me cache ses véritables intentions. »
« J’ai évolué, tandis qu’elle est restée bloquée. »
À travers ces récits autojustificatifs, il reconstruit son image idéalisée et se réassure de sa supériorité morale. Désormais, il devient un « bon objet ». Et vous, un « mauvais objet » entièrement exclu de son récit.
Le mécanisme du clivage : le monde binaire du narcissique
Incapable d’intégrer les nuances émotionnelles, le narcissique perçoit la réalité de manière binaire : tout est soit entièrement bon, soit entièrement mauvais. Ce clivage constitue un mécanisme de défense primitif, hérité de son développement émotionnel infantile. L’enfant qui deviendra narcissique a été dévalorisé et instrumentalisé par sa mère.
Très tôt, il en tire une conclusion instinctive :
« Si maman va mal, c’est que moi, je suis mauvais. »
« Si elle me punit, mais semble heureuse, c’est encore parce que je suis mauvais. »
Cette interprétation profondément blessante l’amène à faire un choix inconscient : plutôt devenir l’abuseur que rester la victime.
À l’âge adulte, il projette ce schéma archaïque sur ses partenaires :
« Je suis entièrement bon. Elle est entièrement mauvaise. »
« Tu veux me faire du mal ? Alors je suis ta victime… Mais je vais te montrer que tu as tort. »
Cette pensée dichotomique l’empêche de percevoir la complexité et les nuances des relations humaines. Par le clivage, il neutralise l’anxiété liée à la perte de l’objet interne idéalisé. En vous dévalorisant totalement, il restaure son sentiment de grandeur.
Autrement dit, en vous transformant en objet persécuteur — un « mauvais objet », à la fois dans son psychisme et dans la relation concrète — il se repositionne comme un être parfait, supérieur, moralement irréprochable : un « bon objet ».
C’est ainsi qu’il parvient à justifier son rejet, brutal et définitif, sans remords, sans culpabilité — et même avec une certaine euphorie narcissique.
Ce processus devient pour lui une source ultime de provision narcissique : se voir comme entièrement bon, pur et supérieur face à un partenaire désormais totalement dévalorisé.
Cette certitude devient sa provision narcissique sadique. Lisez cet article : La provision narcissique.
Vos réactions : la descente dans la spirale de l’abus
Si vous êtes conscient(e) de sa dynamique toxique, à ce stade, vous ressentez un besoin urgent de restaurer l’équilibre avec le narcissique. Vous tentez encore de lui parler, de lui faire comprendre que ce que vous vivez est devenu insupportable.
Vous proposez des compromis, vous essayez d’ouvrir le dialogue, vous cherchez la négociation — espérant, une fois encore, qu’il puisse entendre votre souffrance et accepter de changer.
Mais le narcissique ne peut pas entendre. Enfermé dans le déni de sa propre pathologie, il rejette vos demandes avec froideur, parfois même avec mépris.
Pire encore : vos plaintes le hérissent. Chaque tentative de communication ravive en lui une rage narcissique profonde. Non seulement il refuse de changer, mais désormais, il franchit un seuil supplémentaire dans l’abus.
Le deuxième type d’abus du narcissique classique : le volcan en éruption
S’il s’agit d’un narcissique antagoniste classique, la violence prend une tournure foudroyante. Derrière chaque mot, chaque regard, la colère monte — sans prévenir.
Les accès de rage deviennent incontrôlables, explosifs. Les cris jaillissent comme des lames, les insultes pleuvent comme des gifles invisibles.
Chaque jugement qu’il porte sur vous vous découpe davantage :
« Tu es incapable ! Tu m’étouffes ! Tu ne vaux rien ! Tu es folle ! Tu détruis ma vie ! »
Puis viennent les agressions physiques : parfois un simple geste brutal, parfois des attaques plus sourdes, plus lourdes — où la violence devient presque animale.
Son visage change. Ses yeux deviennent deux foyers d’une rage sans pitié. Il explose, il hurle, il déverse sur vous tout ce qu’il porte en lui de mépris, de faiblesse, de honte, de haine de soi.
Mais c’est sur vous qu’il projette les débris de son propre psychisme, ce chaos de souffrances non digérées.
La sexualité elle-même devient un terrain de cruauté, de domination, de sadisme froid.
Et pendant qu’il vous piétine, il vous trahit, multipliant les infidélités pour mieux vous rappeler votre insignifiance.
Plus vous donnez, plus il vous méprise.
Vos efforts, votre fidélité, votre amour deviennent des offrandes vaines.
Il n’y a plus de négociation possible : vous êtes devenu(e) sa cible sacrificielle.
Sa paranoïa et sa posture de victime
Tout narcissique présente des épisodes de paranoïa plus ou moins prononcés. En cas de crise manifeste, il adopte toutes les caractéristiques de quelqu’un qui se sent persécuté : il croit qu’on l’observe, qu’on a installé des caméras cachées dans sa maison, que vous êtes en train de le tromper, etc.
Dans ce contexte, il se place au centre de ces fantasmes – sa paranoïa vient ainsi nourrir son sentiment d’importance et de grandeur.
Si sa paranoïa est plus subtile, mois identifiable, il vous accusera de lui faire des reproches, de faire quelque chose pour l’agacer, de vouloir l’abandonner ou de ne pas être honnête avec lui. Cette paranoïa s’accompagne alors d’une posture d’autovictimisation : il se perçoit comme votre victime. Lisez à ce sujet l’article intitulé : La paranoïa des narcissiques.
Vous êtes entraîné(e) dans le cauchemar de ses délires
Sans vous en rendre compte, vous jouez le rôle de sauveur ou d’infirmier(ère) psychiatrique. Vous l’accompagnez dans ses angoisses, essayez d’être celle ou celui qui lui apporte de la compréhension, du soutien et un peu d’apaisement.
Inconsciemment, vous nourrirez le fantasme d’être une mère protectrice, salvatrice ou transformatrice. En cherchant à être valorisé(e) par lui, vous devenez indispensable à ses yeux lors de ses crises — alors qu’en réalité, il vous rabaisse et vous dénigre. Vous deux préservez inconsciemment la mécanique inexorable de son fantasme partagé.
Le gaslighting : le décervelage hypnotique
Au-delà de la brutalité physique déjà existante, s’ajoute l’abus psychologique le plus insidieux — le harcèlement mental, ou gaslighting — un véritable décervelage hypnotique.
Inlassablement, il répète les mêmes phrases, les mêmes reproches, les mêmes discours vénéneux, issus de sa propre réalité déformée. Jour après jour, ses mots résonnent comme un mantra toxique. Votre cerveau se synchronise au sien. Ses attaques deviennent une mélodie corrosive, une musique de fond que vous finissez par intégrer.
Et alors, hypnotisé(e) et confus(e), vous commencez à croire à ses accusations :
« Oui, c’est vrai. Je me suis trompé(e). Je suis fautif(ve). C’est de ma faute si tu exploses de colère. C’est moi qui t’ai provoqué. »
Mais votre dévouement et votre soumission ne le touchent pas. Pire encore : cela l’irrite.
Il vous déteste, vous exècre. Car au fond, il ne cherche pas l’amour.
Ce qu’il cherche inconsciemment, c’est votre souffrance. C’est cela sa provision narcissique sadique. Lisez l’article sur le sujet en cliquant ici : Le gaslighting.
Le narcissique caché : la torture du vide et du silence
S’il s’agit d’un narcissique caché, passif-agressif, la violence prend une autre forme — plus feutrée, plus sournoise, mais tout aussi destructrice.
Il ne crie pas. Il n’insulte pas frontalement. Il vous abandonne tout en restant présent.
Ses armes sont invisibles : le silence, le retrait affectif, la distance glaciale, l’absence émotionnelle.
Aucun mot blessant, mais des gestes minuscules, constants, qui ne laissent aucune trace visible — mais s’enfoncent dans votre âme comme des aiguilles sous la peau.
Il ne partage aucun moment de véritable joie.
Il n’offre ni cadeaux, ni surprises, ni attention.
Vos anniversaires deviennent des jours muets.
Vos désirs et vos choix de voyages sont ignorés.
Le rire, la danse, le jeu, le laissent indifférent.
La passion, le plaisir et la tendresse physique lui sont étrangers.
Il ne partage aucune intimité, aucune complicité.
Il ne s’abandonne jamais à vous.
Il ne connaît pas le besoin de construire quoi que ce soit ensemble.
Il se sent au-dessus de tout cela, trônant dans son absence.
Son monde est un désert émotionnel, où seule subsiste sa toute-puissance froide.
Votre dévouement est insignifiant à ses yeux.
Si vous travaillez pour lui, il ignore votre fatigue.
Même vos sacrifices financiers sont ignorés.
Vos efforts et vos succès ne l’émeuvent pas.
Il est incapable d’empathie, tout lui est indifférent.
Il vous abandonne dans un isolement glacé et dans l’agonie d’être nié(e).
L’identité d’absence et le vide du narcissique caché
Tout en étant psychiquement absent, il exige de vous patience, loyauté, compréhension.
Mais plus vous tentez de vous adapter à ses attentes, plus il vous méprise.
Il devient une présence opaque, murée, distante.
Chaque tentative de dialogue se noie dans son mutisme ou se heurte à ses oppositions systématiques. Il vous rend invisible, comme si vous n’existiez plus. Il s’enferme dans ses occupations, son travail ou l’écran de son ordinateur pour rêver.
Vous êtes seul(e), car en réalité, même à ce stade, il reste attaché à son fantasme maternel archaïque. Un fil invisible le relie à cette mère qu’il n’a jamais pu quitter.
Le film The Phantom Thread, de Paul Thomas Anderson, en offre un portrait poignant d’une grande justesse.
Votre besoin d’être vu(e)
Le besoin fondamental de tout nourrisson est d’être vu, reconnu comme un être distinct de sa mère — même si, au commencement, la symbiose avec elle demeure nécessaire.
Si, durant l’enfance, ce besoin n’a pas été comblé, et qu’au lieu d’être vu(e), vous avez été instrumentalisé(e), vous chercherez inconsciemment à réparer ce manque dans votre relation intime.
Vous attendez alors de votre partenaire qu’il vienne réparer ce déficit affectif archaïque, inscrit dès les premiers instants de votre existence. Mais si ce partenaire est un narcissique caché, la souffrance devient abyssale, car comme les singes de la sagesse…
Il ne vous regarde pas.
Il ne vous écoute pas.
Il ne communique pas avec vous.
Quelles sont les conséquences pour vous ?
Peu à peu, des décennies de souffrance remontent à la surface.
Tout ce qui avait été enfoui, comprimé, anesthésié au fil de votre histoire personnelle resurgit avec violence.
Car vous l’aimez encore, ce narcissique pathologique.
Et malgré tout, vous lui restez profondément attaché(e).
Vous êtes suspendu(e) à lui, prisonnier(ère) de cet amour impossible et de son identité faite d’absence, de vide…
Chaque jour passé à ses côtés déclenche en vous des vagues émotionnelles d’une intensité insoutenable.
Vous souffrez, vous pleurez, vous implorez…
Mais face à vos larmes, il demeure de marbre.
Il ne vous serre pas dans ses bras.
Il ne vous console pas.
Il ne tend aucune main.
Son cœur est fermé.
Son âme est sourde.
Son empathie, inexistante.
C’est un enfant qui, à la place du cœur, porte un trou noir.
La spirale de la suradaptation
Chacune de vos protestations, chacun de vos éclats d’émotion deviennent à ses yeux des preuves accablantes : « Elle (ou il) n’est pas celle (ou celui) qu’il me faut. »
Chaque fois que vous exprimez votre douleur, il s’éloigne davantage, et ses violences se déchaînent plus ouvertement encore.
Ce climat insupportable réactive en vous les blessures les plus anciennes — celles de votre enfance, celles que vous portez depuis toujours. Votre détresse s’intensifie. Votre âme se fissure. Votre intégrité psychique s’effondre lentement.
Voici comment cette souffrance se manifeste en vous :
Vous doutez profondément de vous-même. La confiance s’est dissoute.
Vous n’arrivez plus à exprimer vos besoins. Votre voix intérieure s’éteint.
Vous vous éloignez de vos proches. La honte toxique que vous ressentez vous coupe de votre famille, de vos amis. Vous préférez vous cacher.
Même entouré(e), vous êtes seul(e) intérieurement, prisonnier(ère) de votre honte muette — générée par un sentiment d’impuissance.
Cette impuissance renforce les croyances toxiques de l’enfance : « Je ne suis pas assez bien. Je suis insuffisant(e). Je suis indigne d’amour. »
Votre carrière, vos projets et vos activités professionnelles s’effondrent sous le pouvoir hypnotique de ses croyances et de vos propres sabotages inconscients.
Vous sacrifiez votre propre vie pour tenter de plaire encore à celui qui vous détruit, alors que vous êtes vous-même hypnotisé(e) par un fantasme partagé.
Vous glissez dans l’agonie désespérée d’être nié(e), espérant qu’il changera ou qu’une thérapie le guérira.
Enfin, le corps lui-même lâche : douleurs, troubles psychosomatiques, dépression, insomnies, médicaments… Vous devenez un zombie émotionnel, anesthésié(e), coupé(e) de vous-même.
Le réveil du cauchemar
Puis, un jour, vous ouvrez enfin les yeux.
La souffrance est devenue trop grande.
L’épuisement vous brise.
La lucidité se fraie un chemin à travers les décombres de votre esprit.
Et peu à peu, vous commencez à comprendre l’enfer que vous traversez.
Vous voyez enfin l’instrumentalisation systématique dont vous avez été la proie.
Vous mesurez le rôle toxique que vous avez joué à ses côtés.
Et peut-être même — dans un éclair plus profond — vous apercevez le reflet de ce même rôle, autrefois joué auprès de vos propres parents.
Alors, la vérité s’impose avec une violence muette :
Ses comportements sont d’une toxicité absolue.
Vous comprenez qu’il n’y a jamais eu de réciprocité, ni amour véritable, ni réelle complicité. Donc, votre bonne volonté s’effondre.
Et soudain, ce que vous refusiez de nommer depuis le début prend forme :
« Il a une interaction sordide avec moi. »
« Il s’adonne à une mécanique cruelle. »
« Il en devient une machine à broyer. »
Et cette mécanique cruelle n’a généré qu’une peur croissante, la douleur, la solitude et des réactions psychiques comme le syndrome dissociatif. Lisez l’article sur le sujet en cliquant sur ce titre : La dépersonnalisation et la déréalisation.
Vous admettez enfin, que la personne qui partage votre vie est un narcissique — et que sa pathologie vous dépasse, vous submerge, vous échappe, vous détruit.
Huitième phase : la destruction du fantasme partagé et la séparation
Peut-être le ressentez-vous déjà, sans encore pouvoir le dire : Il est en train de partir.
Chaque jour, il devient plus distant, plus froid, plus opaque. Et ce retrait n’est pas anodin : dans les recoins de son esprit, il rumine déjà la séparation.
Mais pour lui, cette rupture n’est pas banale. Elle déclenche deux séismes intérieurs — deux angoisses archaïques majeures.
Première onde de choc : la peur panique de la séparation
Quand il se sépare de vous, il ne quitte pas simplement un(e) partenaire. Il abandonne « sa mère », celle qu’il avait projetée sur vous, celle à qui il avait assigné un rôle réparateur dans son fantasme partagé.
Dans son esprit, c’est cet objet maternel idéalisé qu’il est contraint de détruire pour préserver son espoir illusoire d’indépendance.
Et ce renoncement ravive une angoisse d’abandon primitive, une terreur viscérale, archaïque, de perdre la figure centrale de son psychisme.
Deuxième onde de choc : la réactivation de sa blessure narcissique primitive
En vous rejetant, il est forcé de désidéaliser et de dévaloriser ce qu’il avait sanctuarisé. Or, cela suppose qu’il s’est trompé. Et dans son monde intérieur, se tromper, c’est être faillible ; et être faillible, c’est cesser d’être omniscient, infaillible, parfait et divin.
Ces deux déflagrations — perte du fantasme maternel et perte de son illusion de grandeur — activent en lui sa paranoïa. Il se replie alors dans une bulle de persécution intérieure, où tout devient menace, où tout devient justification à la violence.
La montée de la rage du narcissique
Dans cette phase ultime, le narcissique dramatise sa rage.
Ce n’est plus simplement un retrait : c’est une offensive.
Il s’engouffre dans une quête de triomphe symbolique sur la mère que vous incarnez encore pour lui. Ce n’est pas vous qu’il affronte — c’est sa blessure primitive.
Et pour la vaincre, il doit vous écraser.
Il ne cherche plus seulement à vous éloigner :
il veut vous anéantir psychiquement, vous pousser à bout, vous rendre fou (folle), vous précipiter dans la perte de votre identité, de votre santé mentale, voire de votre vie.
Chaque larme que vous versez, chaque crise de désespoir ou de colère qu’il provoque devient, pour lui, une source d’exaltation narcissique.
Il orchestre votre chute pour se sentir enfin omniscient, invulnérable, tout-puissant, moralement irréprochable et supérieur — tandis que vous vous effondrez dans le silence de votre douleur.
C’est pourquoi Sam Vaknin affirme :
« Votre souffrance est sa guérison, et votre crucifixion est sa résurrection. »
La prétendue rédemption du narcissique s’obtient par procuration : il se nourrit de vous, vous utilise comme vecteur de sa réparation illusoire.
En dehors de cette fonction, vous n’êtes rien. Voilà pourquoi vous êtes si facilement remplaçable, et pourquoi il peut vous abandonner sans un regard, sans une hésitation.
Votre colère légitime
Face à l’intensification de l’abus, vous changez à votre tour.
La colère légitime vous traverse enfin.
Frustré(e), blessé(e), vidé(e) de votre substance vitale, vous ressentez pour la première fois un besoin brûlant : le défier, l’affronter, le blesser.
Vous voulez le faire tomber de son piédestal.
Vous voulez qu’il comprenne enfin que la douleur qu’il vous inflige est insupportable.
Vous voulez qu’il souffre comme il vous fait souffrir.
Vous vous surprenez à penser l’impensable :
« Comment ai-je pu aimer un monstre pareil ? »
Dans cette perception nouvelle, vous osez enfin le nommer : narcissique malade, fou, sadique.
« Je ne peux plus tolérer ta rage. Je ne peux plus t’aimer. »
Mais ce que vous ignorez encore, c’est que cette confrontation le nourrit. Car, au fond, c’est précisément ce qu’il attendait : que vous l’agressiez pour pouvoir endosser le rôle de victime.
Vous lui adressez des messages dénarcissisants :
Vous exposez ses insuffisances, ses failles, sa pathologie.
Vous l’arrachez brutalement à son illusion de toute-puissance.
Et ce faisant, vous lui infligez ce qu’il redoute le plus : l’humiliation.
Or, l’humiliation est pour lui intolérable : elle ravive son complexe d’infériorité archaïque et la honte toxique qu’il a toujours voulu étouffer.
Et plus vous mettez en lumière ses failles, plus ses défenses psychiques se fracturent.
Peut-être qu’il vacille un instant. Mais aussitôt, il réagit avec une violence redoublée — sa rage narcissique resurgit.
Le renversement de la situation
Alors que vous vous sentez encore coupable de vos réactions — pris(e) dans vos défenses autoplastiques et vidé(e) de toute confiance en vous — lui, à travers ses défenses alloplastiques, se croit innocent de tout. Il n’est jamais responsable : tout, toujours, est de votre faute.
Dans son esprit, désormais, vous êtes devenu(e) le bourreau, et lui, la victime. Cette inversion abjecte lui confère une légitimité absolue pour vous détruire sans scrupule.
Sa rancune devient toxique, presque mortelle.
Son désir de vengeance est pleinement conscient — même si ses motivations internes ne le sont pas.
Son fantasme partagé s’est effondré.
Il ne tolère plus rien : ni votre présence, ni votre amour, ni vos larmes, ni vos protestations. Tout de vous le révolte, l’irrite et l’écœure.
Mais derrière cette haine dirigée contre vous, se tapit encore — et toujours — la rage archaïque envers sa mère. Une rage primitive, qu’il ne reconnaîtra jamais.
Il ne veut plus simplement vous quitter. Il veut vous annihiler.
Son faux self — lui-même — vous exècre, vous rejette, vous hait.
D’une intensité absolue.
La démolition sociale de la victime
Par la mécanique inexorable de son fantasme partagé, le narcissique pathologique ne se contente pas de vous dévaloriser, de vous rejeter et de vous abandonner.
Il cherche à effacer votre existence, non seulement de son psychisme, mais aussi de son environnement social.
Donc, il vous diffame auprès de vos familles respectives, alerte vos amis communs, et vous dépeint comme instable, malade, déséquilibré(e).
Il déforme la réalité, réécrit l’histoire et construit un récit odieux à votre encontre. Par exemple, endossant le masque d’un enfant perdu, il parle avec ses frères ou ses enfants aînés issus d’un mariage antérieur. Mais il ne leur explique pas ce qu’il est en train de vous faire.
Ainsi, il transforme ses proches en alliés — en « singes volants » comme les appelle Sam Vaknin — mobilisés inconsciemment contre vous, dès que s’entame la phase de dévalorisation de l’objet externe, qui êtes vous sa victime.
N’importe qui peut se retrouver dans le rôle du singe volant du narcissique. Pourquoi ?
Parce que le narcissique manipule son entourage, afin d’obtenir sa provision narcissique.
Ainsi, partenaires intimes, enfants, parents, amis, collègues de travail, voisins, tout le monde peut devenir le singe volant du narcissique, car ce dernier manipule les gens par le biais de fabulations, de fantasmes et de réalités alternatives qu’il prend lui-même pour la réalité.
Les personnes endoctrinées et recrutées dans son fantasme partagé deviennent ses bras longs et ses armes stratégiques contre sa victime.
Les narcissiques sont convaincants, se montrent vulnérables, et jouent le rôle de victimes. Ce sont des acteurs.
Ils peuvent être ce qu’ils veulent, et croient à leurs propres mensonges, car ils sont totalement investis émotionnellement dans l’histoire qu’ils racontent à tout le monde.
Leur engagement dans leur récit — leur véhémence, énergie, persévérance, insistance, férocité — tout cela est très convaincant. Cela donne confiance.
Il est facile de croire à l’histoire qu’ils défendent, protègent, étayent et soutiennent sans relâche. Leur investissement dans leur propre fiction passe pour la réalité. Et chacun est aspiré et entraîné dans ce fantasme partagé.
Les singes volants deviennent les alliés, sauveurs, guérisseurs, réparateurs du narcissique et prédateurs de sa victime.
Ils cherchent à défendre et protéger ce « pauvre enfant », vulnérable, fragile et blessé, et s’attaquent à sa victime, devenue son adversaire.
Si vous vous trouvez dans l’entourage d’un narcissique, soyez prudent(e).
Demandez-vous : « Suis-je en train de devenir le singe volant d’un narcissique en ce moment même ? Suis-je pleinement conscient(e) de ce que je fais ? »
Posez-vous cette question dans tous les contextes possibles, avec toutes les personnes possibles, car, sans que vous le sachiez, vous pourriez devenir un agresseur.
Vous pourriez devenir vous-même le bras droit du narcissique.
Le narcissisme pathologique est contagieux, et de nombreux singes volants se sont retrouvés dans la position d’abuser d’autres personnes, de leur faire du mal, et de devenir de plus en plus narcissiques.
Soyez prudent(e).
L’abus financier et le vol factuel
Vos sacrifices, vos années d’amour, vos efforts : tout est nié, balayé, effacé. Il s’autorise à tout prendre sans jamais rien rendre. Il refuse de vous rembourser. Il vous fait signer des documents d’exonération, profitant de votre peur, de votre confusion, ou de votre sidération face à sa rage. Il vous dépouille matériellement, tout en se convainquant qu’il est lui-même une victime.
Son narcissisme et sa posture victimaire ne font qu’un — une seule et même identité.
Se revendiquer victime devient sa seule raison d’exister, son ultime justification pour ne jamais affronter l’impuissance tapie en lui, ni la honte abyssale qui l’accompagne.
Êtes-vous masochiste ou hyperempathique ?
Si, malgré tout l’abus que vous avez subi, vous persistez à rester auprès du narcissique — à l’aimer, à vous occuper de lui, sans trahison ni véritable colère — il est essentiel d’interroger votre propre dynamique intérieure.
Peut-être êtes-vous prisonnier(ère) d’un masochisme psychique : une compulsion à vous sacrifier sans fin, à préférer la souffrance plutôt que de renoncer à votre statut de victime.
Ou bien craignez-vous de ne pas avoir les ressources émotionnelles ou matérielles pour partir.
Peut-être est-ce encore la peur panique de la solitude, du face-à-face avec vous-même, de ce moment où il faudrait enfin prendre en charge votre propre destinée.
Plus probablement encore, guidé(e) par une forme d’empathie sacrificielle, presque mystique, vous vous maintenez dans un fantasme inconscient : celui d’être une mère rédemptrice, une figure transformatrice capable de sauver l’autre par l’amour et l’abnégation.
Mais sachez-le : dans tous les cas, le narcissique vous hait pour cela. Car, en réalité, vous l’empêchez d’achever symboliquement sa séparation d’avec sa mère archaïque.
Et plus vous insistez dans cette posture, plus il redouble sa violence et son mépris.
À terme, vous risquez de sombrer dans une dépression profonde.
Le rejet final
La fin du fantasme partagé est une mise à mort psychique.
Lorsque le narcissique n’a plus rien à soutirer de vous — lorsque votre capacité à le nourrir est tarie — il vous expulse de sa vie sans le moindre état d’âme.
C’est une cruauté froide, presque automatique, mécanique. Il vous efface de son existence comme on supprime un fichier devenu inutile. Il vous abandonne brusquement.
Vous vous heurtez alors à un mur : un déni total, une indifférence glaciale, une arrogance triomphante. Il vous raye de son monde intérieur. Et dans son monde extérieur, vous n’existez plus. Même si vous avez porté ses enfants, soutenu ses finances pendant des années, sacrifié votre propre vie à la sienne, il ne vous doit rien... Rien.
Dans le récit qu’il se raconte, ce n’est pas lui qui vous rejette — c’est vous qui l’avez abandonné et trahi. Bientôt, vous apprendrez que votre ex-narcissique a déjà trouvé un(e) autre partenaire intime. C’est alors que vous comprenez que votre présence lui a était toujours indifférente, que vous n’étiez, à ses yeux, qu’un objet interchangeable.
Vous sombrez dans un deuil prolongé
Vous entrez dans ce que l’on pourrait appeler le cimetière du fantasme partagé.
Vous avez renoncé à vous-même.
Vous avez sacrifié votre autonomie, votre joie de vivre, votre identité.
Vous ressentez un vide immense, béant, glacial.
En fait, votre psychisme reste accroché au souvenir de cette figure maternelle que vous pensiez avoir trouvée : celui qui vous maternait, vous idéalisait, vous chérissait — avant de devenir ce vampire froid et sadique.
En fait, vous avec perdu à la fois votre « mère » et votre « bébé » narcissique.
C’est un double deuil déchirant.
Alors reviennent en boucle, l’abandon, le rejet, la trahison, l’humiliation, l’injustice.
C’est la douleur primitive de l’enfance qui hante à nouveau chaque cellule de votre corps. Dans cet état, vous êtes littéralement broyé(e).
Voici les symptômes que vous pouvez présenter :
Perte de votre sens de l’identité, et donc de votre but dans la vie.
Perte de votre sentiment de sécurité et de votre innocence.
Perte du goût de vivre et du sens de l’existence.
Dépression plus ou moins sévère, avec parfois des pensées suicidaires.
Rumination obsessionnelle de son absence.
Désespoir et pleurs récurrents, comme si vous vous sentiez déchiré(e).
Incapacité à fonctionner, à agir — un état de choc émotionnel paralysant.
Isolement total, à la fois social et intérieur.
Insomnie, perte de poids, fatigue extrême...
Votre psychisme est déchiré. Votre corps semble électrisé en permanence.
Vous souffrez d’un stress post-traumatique majeur — souvent mal compris ou minimisé.
Vous souffrez d’une altération de votre perception
Le narcissique n’a pas seulement détruit votre amour : il a reprogrammé votre rapport à la réalité, à votre identité, à vos repères intérieurs.
Vous vous sentez comme un enfant désorienté, forcé de tout réapprendre.
Privé(e) de votre estime personnelle, vous ne percevez aucune raison d’exister.
Vous êtes confus(e), dissocié(e), vidé(e), dépersonnalisé(e).
Vos repères moraux, vos croyances en la justice, en l’amour, sont fracassés.
Vous n’avez plus de direction et vos rêves vous paraissent irréalisables.
Vos projets professionnels vous laissent indifférent(e).
Vous avez perdu la foi en vous-même, en les autres, en l’avenir et en la vie.
Vous commencez à croire qu’il vaut mieux vivre seul(e) que d’aimer encore.
Vous doutez profondément de votre droit au bonheur.
Tout cela parce que vous avez introjecté l’image toxique du narcissique et son identité d’absence. Vous avez incorporé ses messages dévalorisants et vous les ruminez. Il vit dans votre esprit et vous hante. Vous vous identifiez à lui, au point d’agir comme lui.
Vous pouvez présenter des symptômes psychosomatiques, voire certains symptômes d’un trouble de conversion :
Neuropathies, telles qu’une faiblesse musculaire ou une perte d’équilibre.
Mouvements anormaux, comme des tremblements ou des difficultés à marcher.
Épisodes de secousses avec perte apparente de conscience (crises non épileptiques).
Épisodes d’absence de réaction (état de non-réponse).
Difficulté à avaler ou sensation de « boule » dans la gorge.
Dysrégulation physiologique ou hormonale, voire développement d’une maladie auto-immune.
Dans ces cas, c’est votre corps qui, silencieusement, lance un appel au secours. Vous devez alors chercher à comprendre l’origine de ces troubles, consulter un médecin, et accorder une attention totale à votre corps.
Il se peut que ces symptômes soient liés à un auto-rejet profond. Vous avez peut-être besoin de réapprendre à vous respecter, à prendre soin de votre corps, à le nourrir correctement — physiquement, émotionnellement et spirituellement.
Votre « moi souffrant » devient votre propre bourreau
À ce stade, vous n’êtes plus uniquement victime du narcissique.
Vous êtes devenu(e) la proie de votre propre « moi souffrant ».
Il vous persécute intérieurement. Il vous enferme dans la rumination du passé.
Il vous fige dans le vide, dans l’absence, dans le doute.
Il vous entraîne parfois jusqu’au bord du suicide.
Pourquoi ? Parce qu’inconsciemment, vous ressentez une honte toxique.
Pourquoi votre douleur se transforme-t-elle en honte ?
Pourquoi ressentez-vous cette honte ? Vous êtes la victime !
Vous n’avez rien fait de mal. Alors pourquoi ce sentiment d’échec, ce rejet de soi, cette douleur sourde au fond de la poitrine ?
Pourquoi ce glissement vers l’autodépréciation, vers la honte d’être ?
C’est là que le professeur Sam Vaknin apporte une clé précieuse :
Lorsqu’on endure des abus répétés — physiques, psychiques, émotionnels — une douleur profonde s’enracine. Et avec elle, un désespoir insidieux :
« Je suis impuissant(e). Il n’y a rien que je puisse faire. »
Ce désarroi porte un nom : l’impuissance acquise.
Et cette impuissance, surtout lorsqu’elle se répète, devient humiliante.
C’est elle qui génère la honte.
Quand vous êtes soumis(e) à l’humiliation, au rejet, à l’effacement, vous perdez votre pouvoir et votre sentiment de contrôle, votre capacité à agir, à exister.
Vous devenez un objet passif — un réceptacle de souffrance.
Et cette passivité nourrit une forme d’impuissance et d’auto-humiliation.
Cette honte est insoutenable. Elle crée une dissonance intérieure :
D’un côté, vous savez que vous n’avez rien fait de mal.
De l’autre, vous vous sentez honteux(se) et coupable.
Ces deux réalités sont inconciliables. Alors la psyché cherche un compromis.
Elle transforme la honte en outil de contrôle illusoire :
« Si je suis fautif(ve), alors j’ai un pouvoir.
Si j’ai causé cette situation, alors je peux assumer ce fait. »
Ce raisonnement inconscient vous redonne un sentiment d’agir sur votre vie.
C’est ce qu’on appelle une défense autoplastique :
plutôt que d’affronter l’impuissance, vous vous blâmez vous-même.
Il est essentiel de comprendre ceci :
Votre souffrance est réelle, légitime, traumatique et physique.
Mais surtout : vous n’êtes pas condamné(e).
C’est ici que commence votre réconciliation avec vous-même.
C’est ici que vous pouvez, enfin, écouter la voix de votre être authentique.
Le « moi souffrant » n’est pas votre nature essentielle.
Il est un « moi » mental, mais pas votre être authentique.
Vous avez besoin d’arrêter de vous voir comme une victime impuissante.
Et arrêtez de faire de votre victimisation votre principe organisationnel.
Alors… Comment vous guérir ?
Guérir n’est pas seulement récupérer. C’est renaître.
Tant que le narcissique parle dans votre esprit, la guérison est bloquée.
Le non-contact est nécessaire, mais insuffisant.
Vous devez vous séparer de lui physiquement, mais aussi mentalement, émotionnellement et psychiquement.
Vous faites une thérapie. Mais qui fait la thérapie ?
Vous avez introjecté l’image toxique du narcissique et son identité d’absence.
Vous avez incorporé ses messages dévalorisants et vous les ruminez.
Il vit dans votre esprit et vous hante. Vous vous identifiez à lui, au point d’agir comme lui. Peut-être que le narcissique qui vit dans votre esprit « fait la thérapie ».
Si cela est le cas, vous sabotez le processus de déshypnose, de déconditionnement.
Il est crucial de désintrojecter le narcissique :
Reconnaître cette voix mentale persécutrice ;
Identifier ses messages toxiques ;
Les externaliser et les démanteler.
Étapes vers la réappropriation de soi par la Déshypnose Identitaire :
Commencez par nommer le « moi » narcissique de votre esprit :
Donnez-lui un nom. Par exemple : « Le vampire ». Ce « moi » mental n’est pas vous. Distinguez-le de votre être authentique.Différencier les dialogues intérieurs :
Commencez par vous poser ces questions :
« Qui parle dans mon esprit ? »
« Est-ce la voix jugeante du narcissique ? »
« Est-ce son évaluateur dénigrant ? »
« Est-ce sa voix sadique ? »
« Ou est-ce son bébé qui réclame mon attention ? »
Ensuite, exercez votre discernement face à chacune de ces voix :
Est-elle fondée ? Me sert-elle ou me détruit-elle ?
En assistant à mes cours de Déshypnose Identitaire, vous apprendrez à reconnaître, déconstruire et démanteler ces voix intérieures parasites.Revenir au corps :
Le trauma vit dans le corps. Les pratiques somatiques de la Déshypnose Identitaire vous ramènent dans le présent et dans votre corps.Apprendre à écouter la voix de votre être authentique
Cela vous permettra de court-circuiter la tendance instinctive à vous identifier à la voix du narcissique. Vous pourrez enfin arrêter d’être sa mère.
La Déshypnose Identitaire et l’introspection
La Déshypnose identitaire est un puissant processus d’introspection, qui vous permet de sortir de vos conditionnements, de vos traumatismes et de vos états hypnotiques.
C’est la volonté de remettre en question vos certitudes, de ne pas accepter systématiquement les choses telles qu’elles se présentent, et d’oser douter de vos propres interprétations.
C’est apprendre à vous détacher de votre tendance instinctive à vous identifier personnellement à toutes les pensées, interprétations ou réactions émotionnelles qui traversent votre esprit.
C’est le processus d’identifier les origines profondes de vos pensées récurrentes et envahissantes, pour apprendre à les accueillir, à les comprendre et à vous en détacher.
C’est la remise en question de votre identité mentale, afin de vous désidentifier des croyances, pensées répétitives, mécanismes défensifs et schémas inconscients qui ne vous définissent pas, et qui appartiennent à cette identité erronée.
C’est un choix de liberté intérieure : renoncer à vous tourmenter en vous identifiant à ce que vous n’êtes pas, et abandonner l’idée que vos interprétations personnelles sont des vérités absolues.
C’est sortir de l’hypnose identitaire : quitter la dépendance affective, et devenir adulte, pleinement responsable, cultiver une maturité et une intelligence émotionnelle.
C’est apprendre à s’aimer soi-même, pour de vrai.
En somme, l’introspection est une invitation à explorer les profondeurs de votre psyché, à questionner vos conditionnements, et à renouer avec votre authenticité et votre sens de l’humour. Elle vous encourage à dépasser les illusions et les réflexes mentaux hérités du passé ou influencés par le narcissique qui vous a traumatisé.
Le professeur Sam Vaknin décrit l’amour de soi, ainsi :
L’amour exige le respect de sa propre altérité, ainsi que de celle de l’autre.
C’est le respect fécond de la différence de chacun, non une fusion stérile fondée sur la dépendance ou l’usage de l’autre pour réguler ses émotions et son équilibre interne.
L’amour est synonyme de croissance personnelle, non d’infantilisation.
Celui qui reste en état régressif nourrit des fantasmes destructeurs, comme le fantasme partagé. L’amour, enfin, est le triomphe du discernement et de la sagesse sur les illusions infantiles.
Soyez présent(e)…
La présence, c’est ce qui se passe quand vous revenez dans votre corps, dans votre souffle, dans l’instant, dans votre nature essentielle. Ce n’est pas de la passivité.
C’est la puissance tranquille d’être inébranlable, sans violence, sans illusions.
Chérissez votre précieuse vie…
Consacrez-la désormais à votre évolution, à votre reconstruction, à la joie d’exister en dehors de l’abus, du fantasme, de la fusion.
Vous n’êtes pas né(e) pour vivre dans l’ombre, ni pour vous définir à travers la douleur.
Vous êtes né(e) pour rayonner votre propre lumière.
Lisez cet article en cliquant sur le titre. Il vous éclairera sur le chemin à parcourir : L’introspection.
Neuvième phase inattendue : le hoovering — la relance narcissique
Le narcissique souffre d’une impermanence de l’objet : incapable de maintenir un lien affectif stable, il vit dans l’instabilité constante de ses représentations.
Ses perceptions, ses sentiments, ses jugements et ses comportements à votre égard fluctuent sans cesse, au gré de ses humeurs et de ses tensions internes.
Aucun attachement ne demeure fiable. Tout objet relationnel passe inexorablement du statut d’idéal à celui de déchet.
Lorsqu’il vous rejette définitivement, il retrouve une forme de pureté narcissique : il se sent moralement supérieur, quasi divin. À ses yeux, vous êtes devenu(e) l’incarnation de tout ce qu’il déteste et projette hors de lui.
Mais, après vous avoir ainsi expulsé(e) — vous et l’avatar dévalorisé qu’il avait fabriqués de vous — un vide le submerge à nouveau.
Ce vide réactive son angoisse archaïque. Il lui faut combler ce manque. Parfois, il cherche une nouvelle proie. Mais il peut aussi revenir vers vous.
C’est alors qu’il déploie le « hoovering » — terme introduit par le professeur Sam Vaknin, désignant dans ce contexte la « manœuvre d’aspiration du narcissique ». En réalité, il s’agit d’une relance narcissique.
Si vous doutez de vous-même, il vous dira implicitement : « Tant que tu me donnes de l’espoir, je te poursuivrai. Je continuerai à revenir vers toi pour en avoir plus, je vais essayer de te contraindre à revenir à mon fantasme partagé. »
Dans quelle attitude revient-il, et pourquoi vous relance-t-il ?
Dans cette phase, le retour du chaos est inévitable avec un narcissique. Il ne revient pas pour initier cette fois une relation intime avec vous, car il est incapable d’intimité.
Il revient pour réinstaurer son contrôle et non pour partager un espace de paix intérieure.
Sa mécanique inexorable de contrôle est conçue pour vous désorienter et vous replonger dans la souffrance qui le maintient lié à vous — c’est sa provision narcissique sadique.
Si vous avez fait un travail d’introspection, vous évitez tout contact.
Mais si vous acceptez de parler avec lui, c’est votre ultime test.
Il évoque les bons souvenirs, ressort des phrases attendrissantes, revêt le masque qui avait déjà fonctionné ou présente des excuses désespérées et des promesses de changement. Si cela ne suffit pas, il adopte la posture de victime pour vous faire culpabiliser de l’avoir quitté.
Il revient parce qu’il est incapable de faire taire ses voix intérieures : celles de ses parents abusifs, de ses juges internes, de sa haine de soi.
Dans son esprit résonne sans cesse une cohorte d’autoaccusations :
« Tu es indigne. Tu es nul. Tu es mauvais. Tu n’es rien. »
Face à cette terreur d’être un « mauvais objet », il a besoin de vous. Il déverse sa douleur dans votre psychisme pour tenter de s’en libérer, ne serait-ce que temporairement.
Il doit vous réidéaliser pour retrouver, à travers vous, l’estime de lui-même — cette image intérieure de perfection divine qui le rassure, qui lui donne le sentiment d’exister.
Mais cela devient impossible si vous l’avez confronté à sa pathologie ou s’il s’est senti humilié, exposé. La réparation qu’il recherchait n’est alors plus envisageable.
Incapable de vous réidéaliser, il cherche ailleurs.
Ou bien, il vous recontacte… Mais en se réinventant. Il revient, vous supplie, vous parle d’amour, vous promet qu’il a changé. Mais en réalité, il ne revient pas vers vous : il revient vers son fantasme partagé. C’est sa compulsion de répétition. Lisez l’article : La compulsion de répétition des narcissiques.
Le piège du hoovering : la relance du cycle
Il réapparaît, doux, charmeur. Il évoque vos souvenirs, réactive vos émotions.
« J’ai compris. J’ai changé. Cette fois, ce sera différent. »
Mais cette relance perpétue les mêmes phases de la relation.
Accepter sa relance, c’est replonger dans l’enfer de son fantasme partagé.
Rapidement, vous ramène sans cesse à un état dissociatif, car il attaque vos fonctions psychiques fondamentales :
Votre perception de vous-même et du monde s’altère.
Vous perdez la capacité de discerner ce qui est bon ou nocif pour vous.
Vous perdez la capacité de poser vos limites et d’écouter vos besoins essentiels.
Vous ne distinguez plus vos objets internes de la réalité.
Votre jugement devient flou.
Votre régulation émotionnelle s’effondre.
Il vous ramène à un état de nourrisson, dans une expérience de déréalisation et de dépersonnalisation.
Sans défense, sans ego fonctionnel, sans voix.
Dans ses bras… et sous ses griffes.
Trouver la force de partir
Au fond, vous le savez : il faudra partir. Mais partir exige du courage, du soutien extérieur, et des ressources thérapeutiques et juridiques solides.
Cherchez de l’aide.
Parlez.
Consultez.
Préparez-vous juridiquement.
Lisez cet article en cliquant sur le titre: Quitter un narcissique pathologique.
Fuyez la tentation de la victimisation éternelle
Oui, vous avez été victimisé(e). Mais vous n’êtes pas une victime.
Si la victimisation devient votre identité, elle se transforme en une doctrine pernicieuse, un mécanisme intérieur insidieux.
Il n’existe qu’une seule issue véritable à la spirale victimaire : reprendre votre pouvoir, vous approprier pleinement votre vie, vos choix — et les conséquences de ces choix.
Fiez-vous à votre intuition : elle ne vous trahira jamais.
Travaillez à guérir vos blessures.
Libérez votre esprit de l’emprise.
Et utilisez la dérision comme arme de lucidité.
Comme le dit Sam Vaknin avec ironie :
« La princesse qui embrasse un crapaud le transforme en prince.
Mais celle qui embrasse un prince ostentatoire découvre avec horreur qu’il n’était même pas un crapaud. »
Les quatre étapes de la libération
1. Retrouver son pouvoir d’agir :
Cesser de remettre son pouvoir personnel à l’autre.
Assumer ses choix, ses décisions, ses actes.
Renoncer à la défiance, à l’insoumission automatique, aux passages à l’acte, au machiavélisme, à l’irréflexion.
Redevenir acteur(trice), pleinement responsable de sa trajectoire.
2. Retrouver l’authenticité :
Se séparer émotionnellement et psychiquement de l’abuseur.
S’affirmer comme individu distinct.
Désintrojecter la voix intérieure critique issue de l’agresseur.
3. Retrouver la pleine présence :
Être là. Ici. Maintenant.
Habiter son corps, sa respiration, chaque vibration de vie.
Ressentir sa propre énergie vitale, son ancrage existentiel.
4. Retrouver sa pleine humanité :
Rompre le lien traumatique.
Faire preuve d’humilité, de patience, d’ouverture.
Apprendre à aimer son véritable soi, et non le soi idéalisé.
Pour comprendre comment retrouver votre pouvoir d’agir, votre authenticité, la pleine présence et l’humanité, lisez cet article en cliquant sur le titre : L’introspection.
Résolutions et engagements envers vous-même
Votre santé mentale et physique dépend de votre fidélité à ces engagements essentiels :
Je me traiterai avec dignité et j’exigerai le respect.
Je fixerai des limites claires et je les communiquerai sans ambiguïté.
Je ne tolérerai ni abus ni agressivité, sous aucune forme.
J’exprimerai mes besoins, mes attentes et mes désaccords avec calme et assurance.
Je traiterai les autres comme je souhaite être traité(e).
Si mes limites sont ignorées, je mettrai fin à la relation — sans retour possible.
J’apprendrai à mieux me connaître et à m’aimer vraiment.
Voici les quatre piliers de l’amour :
La conscience de soi :
Une connaissance fine, détaillée, bienveillante de ce que vous êtes.L’acceptation de soi :
Une acceptation inconditionnelle de soi, de ses expériences, de son histoire.La confiance en soi :
La certitude que l’on veille sur soi, que l’on peut se faire confiance.L’efficacité personnelle :
La conviction que l’on est capable d’agir, de créer, de réussir.
Le grand poète Rūmī disait :
« Votre tâche n’est pas de chercher l’amour,
mais de découvrir et de démanteler toutes les barrières
que vous avez érigées contre l’amour. »